vendredi 16 juillet 2010

PLAIDOIRIES D’EUROPE: « Mon père, ce si brillant avocat... »


Il y a un discours pour le microcosme occidental, celui qui s’intéresse aux agendas politiques d’un petit pays comme le Sénégal ; il y a un autre, tropicalisé, que l’on sert à l’opinion publique locale qui décidera pourtant, en dernier ressort, de l’identité du successeur du président Wade, étant entendu que derrière toutes les « offensives » politiques constatées ces derniers mois, c’est ce dossier qui cristallise les passions. Le dernier numéro de duettistes des Wade est un vernis qui peut scintiller en France mais qui craquelle sous la chaleur sénégalaise…

Wade-président comme Me Wade l’avocat, tous deux sont mobilisés pour Karim Wade. « Je n’ai pas l’intention de mettre mon fils à ma place avant de partir. Mais c’est un citoyen sénégalais, il a le droit de faire de la politique et il est libre de se présenter aux élections quand il voudra », vient de répéter le président de la république lors d’une interview accordée à la chaîne de télévision Europe 1. Pas fortuit comme déclaration, vu le contexte et le lieu ! Ces propos viennent consolider la « défense » du ministre d’Etat qui, quelques jours auparavant, s’était signalé dans une sortie « médiatique » enrobée de polémiques dans une « chaîne de télévision américaine », en fait l’équipe audio-visuelle d’un groupe de recherches yankee. Il y disait en substance que ni lui, encore moins son père n’étaient engagés, comme on leur en prête l’intention, dans un projet de dévolution monarchique du pouvoir au Sénégal.
Quel est le contexte qui préside cette double-précision ? Elle a lieu à Paris, à la veille des festivités marquant le 14 juillet, la fête nationale française. Placé sous le signe des armées des pays ouest-africains, anciennes colonies françaises, le 211ème anniversaire de la prise de la Bastille a vu des organisations non-gouvernementales s’en prendre à « certaines armées » africaines nids de « criminels » alors que le débat sur la « Françafrique », les réseaux de la diplomatie hexagonale dans ses anciennes possessions, reprend de plus belle.
Selon Jean C. Rufin, d’ailleurs, les affaires africaines les plus sensibles sont tranchées par Claude Guéant qu’il qualifie de « préfet qui n’a pas une connaissance particulière de l’Afrique ». M. Rufin va plus loin, puisqu’il estime que M Guéant est une sorte d’électron libre qui tire des ficelles à sa guise, sans rendre compte, ni à l’Assemblée nationale, ni au gouvernement. Il se demandait même d’ailleurs si, le Président Sarkozy est au courant de tout ce que fait Guéant !
L’histoire se poursuit et Le président Wade endosse à nouveau sa robe d’avocat, enfourche son cheval, alors que les dernières déclarations de l’académicien Jean-Christophe Ruffin, ancien ambassadeur de France, n’ont pas été pour rassurer les cercles influents qui suivent de près l’évolution politique du Sénégal, surtout quand il a évoqué la perception que le ministre d’Etat se faisait de sa position au sein de l’appareil d’Etat.
Me Wade précise dans son entretien avec Europe 1 que l’ambassadeur Ruffin ne l’a jamais critiqué. « J’ai d’excellentes relations avec lui, sinon il y a longtemps qu’il serait reparti », a-t-il tenu à préciser. Rufin avait également tenu les mêmes propos, sur la RFM, non sans les préciser : « Mes relations avec Karim Wade n’étaient pas aussi bonnes que mes relations avec son père, qui était marquées par le respect et la confiance… ». Wade ne fait que les corroborer les propos de J.C. Rufin. Avec le fils Wade par contre, la nature des relations est différente : « Karim Wade est hostile à la critique et même au dialogue », avait-il ajouté sur la même radio. Et les reproches faits au ministre des infrastructures et au gouvernement Wade, sont aussi lié à la cohérence de la gouvernance et Karim Wade est au cœur de cela : « C’est vrai qu’on ne peut avancer dans la voie du développement qu’en marchant sur ses deux pieds. Ça veut dire qu’on ne peut pas faire que des infrastructures. C’est Clair. Il faut aussi qu’il ait un volet social, un volet rural, il n’y pas que Dakar, il y a tout le pays. Je pense que les autorités en sont conscientes ». C’était au cours d’une interview dans le N°2 du mensuel « Emergence Plus »
Le discours des Wade, c’est donc juste pour minorer la portée des propos de l’ancien diplomate. Dans une démarche bien concertée, le père et le fils envoient le message que la France d’abord veut bien entendre, alors que la question de la succession se fait de plus en plus pressante, à vingt mois de la prochaine présidentielle.
Pour entrer dans les bonnes grâces des pouvoirs politiques français, croyant sans doute que ce sera opératoire à l’heure des choix, Karim Wade s’est attaché les faveurs du secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant, contre les membres les plus influents de la cellule africaine du palais présidentiel français, conscients que le label démocratique sénégalais court un risque majeur avec l’intrusion de la question familiale à un tel niveau ; du jamais vu… J. C. Rufin n’évoquait-il pas récemment sans les nommer, les nouveaux réseaux, en l’occurrence, la « Françafrique » qui emprunte d’autres sentiers que celui des réseaux à la Foccart. C’est-à-dire que les nouveaux maîtres de l’Elysée travaillent pour leurs clients. L’allusion est claire, il parlait de certaines familles des palais africains !
Même Etienne Leenhardt, grand reporters sur France 2, la chaîne publique française, malgré sa bourde sur l’inexistence de dictature en Afrique, a, à la veille du 14 juillet, parlé de « tentations », évoquant le projet de dévolution monarchique qu’on prête au Président Wade.
Qu’il le reconnaisse ou non, le ministre d’Etat Karim Wade est devenu la principale préoccupation du président de la République. Devant les inondations ; devant le rationnement de l’électricité ; devant les questions majeures qui préoccupent les Sénégalais...
Le lundi 12 juillet, le président Wade renonçait à présenter devant l’Assemblée nationale un projet de loi instituant le poste de vice-Premier ministre. Derrière cette modification de la Constitution, après l’institution d’une vice-présidence, un poste jusqu’ici non pourvu, beaucoup avaient vu une énième manœuvre pour « encadrer » la succession du président Wade en faveur de son fils. Le dernier renfort arrivé dans les rangs de l’opposition, Cheikh Tidiane Gadio, a justifié le lancement du Mouvement patriotique et citoyen (MPC) par la nécessité de s’opposer à « une dévolution monarchique du pouvoir » ; un projet qu’il dit avoir constaté après neuf passés à la tête du ministère des Affaires étrangères, surtout les jours qui ont suivi la réélection, en 2007, du président Wade pour un mandat de cinq ans.
Plombé par une défaite électorale lors des dernières élections municipales en 2009 à Dakar où il trustait l’hôtel de ville, Karim Wade a par la suite été nommé ministre d’Etat, en charge des Infrastructures, de l’Aménagement du territoire, de la Coopération internationale et des Transports aériens après avoir dirigé l’agence chargée d’organiser le dernier sommet de l’Organisation de la conférence islamique.
Karim Wade n’a pas répondu jusqu’ici aux graves accusations de gaspillage des deniers publics proférées à son encontre par le journaliste Abdou Latif Coulibaly dans son livre « Contes et mécomptes de l’Anoci ». Par contre, il a déposé une plainte contre « Business Insider » et le journaliste Lawrence Delavingne qui l’accusent lui et Thierno Ousmane Sy, le conseiller-Tics du chef de l’Etat, d’avoir touché des pots-de-vin dans des dossiers relatifs à l’octroi de licences de téléphonie.
On lie l’entrée dans l’opposition de l’ancien PM, Macky Sall, à la volonté de l’Assemblée nationale qu’il présidait d’auditionner Karim Wade alors président de l’Anoci, sur la gestion de l’argent public mis sous sa responsabilité alors que la polémique enflait au Sénégal après le lancement de travaux publics pour rénover la capitale et l’engagement de milliards de francs Cfa à cet effet. L’actuel président de l’Apr, maire de Fatick, avait été contraint par la suite de quitter le perchoir de l’Assemblée nationale.
De manière insistante, le président Wade vante les compétences de son fils et le met en selle auprès de tous les cercles influents, comme ce fut le cas lors de son dernier séjour à Touba après l’intronisation du nouveau khalife général des mourides, Serigne Sidy Mokhtar Mbacké. Ce sont des signaux forts, comme des feux de brouillard, sur la route de 2012, alors que la météo n’a jamais été aussi mauvaise et…électrique.


Source : (http://www.nettali.net/Mon-pere-ce-si-brillant-avocat.html)

jeudi 15 juillet 2010

SENELEC : Chronologie d’un mensonge d’Etat , Qui a peur de virer Samuel Sarr ?


«Avec notre ‘vaste’ programme Suxali Senelec, de production, de transport et de distribution d’électricité, il n’y aura plus de délestages en fin 2006». Ces propos de Samuel Sarr, alors directeur de la Senelec, devenu ministre de l’énergie, sont assez symptomatiques de l’état de déliquescence dans lequel le régime d’Abdoulaye Wade a plongé le Sénégal. Après dix ans d’exercice du pouvoir, les coupures intempestives d’électricité sont encore d’actualité, malgré les promesses d’ivrogne d’un ministre indigne de l’énergie. Retour sur la chronologie d’un mensonge d’Etat.
« On a beau dissimuler ses excréments au fond de l’eau, ils finissent toujours par remonter à la surface. »
S’il y a une personne qui se fout royalement de la gueule des Sénégalais, c’est bien Samuel Sarr, dont on ne comprend toujours pas, ce qu’il fout encore à la tête de la société d’électricité. A moins que celui qui l’a promu à ce poste et tarde à le virer, ait intérêt à ce que ce pirate et contrebandier de l’électricité, qui joue avec le porte-monnaie et la sécurité des Sénégalais, ait été nommé à ce poste dans le seul but de préserver des intérêts dont personne n’ose parler ouvertement.
En quittant la direction de la société d’électricité, l’opinion pensait, que Samuel finirait ses jours en tôle, après que les parlementaires ou personnes accréditées l’auront audité, pour rendre compte et éclairer nos lanternes sur les milliards de Francs Cfa injectés dans ladite société, sans que cela serve à réduire ou à mettre fin aux coupures intempestives d’électricité.
Loin de là. Sous le régime d’Abdoulaye Wade, la promotion des médiocres n’est pas le seul apanage du gouvernement, mais des sociétés nationales comme la Lonase ou la Senelec. Lors d’une visite en présence du directeur général de la Senelec d’alors, Cheikh Diakhaté, Samuel Sarr, qui continue de briller par son incompétence à la tête département de l’énergie, parlait de la mise en service de la centrale de Kounoune, ce qui devrait réduire considérablement les coupures d’électricité.
Il avait aussi promis, qu’à partir du 15 juin 2007, la centrale de Kounoune allait tourner à plein régime après des mois de fonctionnement partiel. Sans mentionner l’installation par la Sogem, dans le même mois, d’une centrale en Mauritanie via le réseau interconnecté de Manantali, laquelle était censée apporter 40 Mw supplémentaires au réseau, entre autres promesses.
«Des actions seront menées pour que la Senelec retrouve un cycle d’exploitation normal», dans un délai de 60 à 90 jours, avait renchéri à l’époque, le ministre de l’Energie, qui tarde à nous dire ce qu’il est advenu des 10 milliards de Francs Cfa, que l’Etat du Sénégal a (ou aurait) mis à la disposition de la Senelec pour servir de garantie, un montant auquel il faudra ajouter les 17 milliards de Francs octroyés par la Banque Islamique de Développement (Bid) pour l’achat de combustible.
Pour mieux appâter le consommateur qui est privé de courant électrique tout en payant des factures exorbitantes, le même ministre annonçait que 512 milliards de Francs Cfa seraient injectés dans le capital de la Senelec avant 2012, ce qui permettrait la réalisation de la centrale de Kahone en fin 2008, de celle de Tobène ainsi que l’achèvement de la ligne 225 kv Tobène-Touba.
On se demande bien, ce qu’attendent les consommateurs, pour assiéger les locaux de la Senelec et exiger le départ sans conditions de Samuel Sarr, qui devrait être attrait illico presto devant le nouveau tribunal (fictif) dont parlait le président pour juger les délinquants et auteurs de crimes économiques…
Le ministre de l’énergie, sûr de son impunité, avait juré, que le livre du journaliste Babacar Touré, « Le Triomphe de l’imposture, enquête sur l’énergie au Sénégal », ne serait jamais édité au Sénégal. Pour une fois, Samuel Sarr a tenu parole. Malgré les moyens immenses mis en œuvre pour briser la plume du journaliste, l’ouvrage, dont il est le principal protagoniste qui ne tient pas le bon rôle, a finalement été publié en septembre 2009 en France.
On comprend pourquoi la meute enragée s’est ruée dernièrement sur Latif Coulibaly, qui, preuve à l’appui, démontrait dans son livre « Lonase, chronique d’un pillage organisé », que Baïla Wone, directeur de la Lonase (Loterie Nationale Sénégalaise), avait formulé par écrit, en septembre 2006, deux demandes de virement d’un montant de 250 millions de Francs chacune, sur un compte inconnu des services comptables de la Lonase. A l’instar de Samuel Sarr, Abdoulaye Wade avait viré M. Wone avant de le faire revenir à la tête de ladite société.
On ne sera jamais édifié sur les 500 milliards de la Lonase, comme on ne saura jamais où Samuel Sarr a planqué les 21 milliards annoncés par l’actuel DG de la Senelec à la veille de la coupe du monde de football. A coup sûr, ce n’est pas Abdoulaye Wade, encore moins Samuel Sarr qui offrira une centrale nucléaire -pardon- l’énergie solaire gratuite à tout un continent… En fin de compte, Samuel Sarr, c’est comme un prêtre pédophile, qui, au lendemain de son inculpation pour attouchements répétés sur des enfants sourds, se retrouve porte-parole du Vatican avant de devenir Pape. Reste à savoir à qui profite le crime, s’il était le seul…« à abuser de l’intimité des jeunes garçons ». Quant à Senelec, c’est un peu comme la météo. La plupart du temps, elle est pourrie.

Momar Mbaye
mbayemomar@yahoo.fr
(http://www.seneweb.com/news/elections2007/article.php?artid=33669)

HISTOIRE EX-COLONIES: Afrique. De la répression de Thiaroye dans le Sénégal de 1944...

L’invitation lancée aux chefs d’État des ex-colonies se prétend hommage aux anciens tirailleurs de la France libre, particulièrement ceux du Sénégal et du Cameroun. Quitte à oublier les conditions dramatiques qui leur furent réservées lors de leur retour au pays.
Durant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy avait annoncé un changement de fond en comble dans la politique africaine de la France. Trois ans plus tard, cette «rupture» semble surtout s’être traduite, au moins sur le plan diplomatique, par une irrésistible propension à la gaffe. Il y eut d’abord certain discours de Dakar pour reprocher à ce continent de ne pas parvenir à rentrer dans l’histoire et aux Africains de s’enfermer dans des comportements émotifs et répétitifs hérités de l’enfance. L’invitation lancée aux chefs d’État des anciennes colonies pour ce 14 Juillet ambitionnait-elle d’inculquer à ces peuples le sens de la durée ? Fêter en commun (ex-métropole et anciennes colonies) le premier demi-siècle d’indépendance laissa rêveuses les opinions concernées : depuis quand le maître se charge-t-il de commémorer l’élargissement des esclaves, s’interroge en substance une large partie de l’intelligentsia africaine… Grand organisateur des festivités, Jacques Toubon a pensé désamorcer la situation en conviant les armées des divers jeunes pays concernés à participer symboliquement à la parade militaire de la fête nationale française, façon, selon lui, d’honorer la mémoire des anciens tirailleurs ayant combattu dans les rangs de la France libre. Mais voilà, là aussi l’argument éveille des souvenirs amers, souvent plus humiliants que fraternels.
Méconnu de l’opinion française, l’incident de Thiaroye, au Sénégal, souleva une intense émotion, non seulement dans le pays concerné, mais dans toute l’Afrique francophone. Des tirailleurs ayant combattu pour la France libre reviennent au pays, fin 1944, et découvrent dans le camp de transit que leur prime de démobilisation serait de 50% inférieure à celle de leurs compagnons de combat français. Mutinerie, les révoltés, prétendant faire honorer les promesses faites, vont jusqu’à retenir un officier supérieur. Ce dernier leur ment et promet que les engagements pris seront tenus ; libéré, il envoie la nuit suivante les blindés encercler la base et faire plusieurs dizaines de victimes.
Le film réalisé par Sembène Ousmane en 1988, Camp de Thiaroye, ne connut pas de véritable diffusion en France. Pas plus que son autre œuvre, Emitaï, également basé sur un fait authentique : un village de la Casamance refuse de payer la majoration de l’impôt en nature auquel il est assujetti. Administration et militaires coloniaux multiplient les mesures d’intimidation jusqu’à la répression sanglante sur laquelle se clôt le film. Précision, cette insurrection paysanne, dirigée à l’origine contre le pouvoir colonial pétainiste, est réprimée dans le sang par le pouvoir colonial gaulliste récemment mis en place, l’officier commandant la troupe étant, lui, inchangé (1).
Surtout, il y eut le 8 mai 1945, en Algérie, le bain de sang de Sétif dont l’onde de choc fut ressentie jusque dans ce qui s’appelait alors l’Afrique équatoriale française. Le jour de la capitulation allemande, la police ouvre le feu sur une manifestation coorganisée par l’AML (Amis du manifeste et de la liberté) de Fehrat Abbas et le PPA (Parti populaire algérien) de Messali Hadj (alors déporté à Brazzaville). Suivent deux jours d’affrontements, jusqu’à l’intervention de l’armée avec appui aérien. Une centaine de morts européens, plusieurs dizaines de milliers dans la population arabe. Anecdote significative : Fehrat Abbas fut arrêté ce 8 mai dans un salon du gouverneur général à Alger, où il était venu présenter les félicitations de l’AML pour la victoire alliée sur le nazisme !
La façon dont les militaires camerounais ayant combattu dans les FFL (Forces françaises libres) furent rapatriés évoque irrésistiblement les faits ayant conduit au massacre de Thiaroye. Le 15 mars 1944, le général Marchand, en poste au Cameroun, s’interroge sur les influences néfastes que ceux-ci pourraient exercer sur les garnisons restées sur place : «Des contacts ne manqueront pas de s’établir entre eux et leurs camarades de l’unité. Ainsi des militaires indigènes des unités de souveraineté risquent, si l’on n’y prend garde, d’être travaillés au camp ou au cours de leurs sorties au détriment de la discipline. De plus, il est à craindre que l’activité des rapatriés ne se fasse sentir dans les centres de brousse où ils auront élu domicile» (2). Pour mieux veiller au grain, le général Marchand propose la création de services de renseignement dans chaque garnison.
Le commandant d’armes de Douala en remet une louche en juillet 1944 : «La conduite des tirailleurs en provenance d’AFN a certainement été soumise à des influences anti-françaises, mais les agitateurs qui semblaient se trouver parmi certains caporaux rapatriés n’ont pas pu être découverts.»
Les milieux coloniaux accueillirent donc ces hommes moins comme des combattants de la démocratie que comme des trublions potentiels dont il fallait redouter les idées qu’ils avaient pu en cours de route se mettre en tête. La reconnaissance attendue laissait place à une suspicion de tous les instants à l’égard de ces «évolués» non prévus dans le schéma raciste ayant jusqu’alors régi les rapports colonisateurs-colonisés. Chargé du suivi du rapatriement des militaires africains, le général Delange aura, dans un rapport du 11 juin 1946, cette phrase ineffable : «Nos démobilisés sont gentils, ils sont disciplinés et se montrent encore confiants vis-à-vis de leurs anciens officiers, mais si cette confiance disparaît, la situation deviendra rapidement très grave. Inutile d’insister.»

(1) Ces deux chefs-d’œuvre du cinéma africain sont désormais accessibles en DVD.
(2) Cf. Eugène-Jean Duval : le Sillage militaire de la France au Cameroun 1914-1964 (L’Harmattan, 2004).
Jean Chatain
(http://www.humanite.fr/15_07_2010-afrique-de-la-répression-de-thiaroye-dans-le-sénégal-de-1944-449779)

vendredi 9 juillet 2010

Sénégal : Les certitudes d'Abdoulaye 1er




A 84 ans, l'ancien opposant libéral, maître de la présidence depuis 2000, n'a nullement l'intention de décrocher. Me Wade ne doute de rien, surtout pas de lui-même.

Cette statue titanesque n'est pas qu'une allégorie ; elle vaut aussi parabole. Bien sûr, le Monument de la Renaissance africaine, perché sur une colline du grand Dakar, exalte avec une légèreté soviétique la vigueur de l'esclave affranchi de ses chaînes, jaillissant des tréfonds d'une longue nuit de servitude, porté vers un avenir radieux par le vent du large et de la liberté. Mais l'inauguration du mémorial, prologue le 3 avril aux festivités du cinquantième anniversaire de l'indépendance du Sénégal, reflète en outre l'ambition démesurée d'un homme : Abdoulaye Wade.
Lorsqu'un énorme et luxueux 4 x 4 le dépose au pied de l'ouvrage, l'ancien avocat au crâne poli, porté à la présidence voilà dix ans par la grâce d'une alternance exemplaire, ne savoure qu'à demi son triomphe. Certes, une vingtaine de ses pairs africains honorent la cérémonie de leur présence. Il n'empêche : lui avait espéré un temps la venue de Barack Obama, de Nicolas Sarkozy ou du Brésilien Lula. D'ailleurs, à ses yeux, ce monument peut prétendre donner la réplique à la statue de la Liberté - qu'il domine de 7 mètres sous la toise - à la tour Eiffel, au Christ rédempteur de Rio de Janeiro, voire au Sphinx égyptien... Cousinage flatteur pour un pensum cuivré de facture nord-coréenne.
A propos de facture, celle de l'oeuvre est à peine moins salée que les embruns de l'océan qu'elle domine : 15 à 25 millions d'euros, selon les estimations. Aux yeux du Dakarois frondeur et désargenté, il y a plus choquant : "Gorgui" - le Vieux en wolof, l'un des surnoms familiers de Wade - s'octroie 35 % des recettes que laisseront les visiteurs, au titre de son statut de "créateur artistique". Mieux, il délègue la gestion du site à une fondation à vocation éducative, confiée à son fils et conseiller spécial Karim, par ailleurs ministre d'Etat et héritier présomptif.
Du monopartisme au pluralisme encadré
"Sarko" ayant donc décliné l'invitation, c'est à l'ambassadeur Jean-Christophe Rufin qu'échoit ce jour-là la mission de représenter la France. Laquelle dépêche aux festivités du lendemain Brice Hortefeux, ministre de l'Intérieur et - nul ici ne l'a oublié - premier titulaire du portefeuille de l'Immigration. Choix insolite, à l'heure de célébrer le demi-siècle d'émancipation de ce qui fut la première colonie subsaharienne de l'empire gaulois.
Dès 1659, en effet, une poignée de pionniers établirent un comptoir sur l'île de Saint-Louis. Trois siècles plus tard, le Sénégal souverain naîtra d'un rêve évanoui. Premier Africain agrégé de grammaire, Léopold Sedar Senghor avait cru pouvoir conjuguer au futur son élan unitaire. En clair, le jeune président-poète tente de réunir les pays de l'ex-AOF - l'Afrique occidentale française - au sein d'une entité fédérale. En vain : seul le "Soudanais" Modibo Keïta consent à rallier la Fédération du Mali. Aventure éphémère : dès le 20 août 1960, le couple, miné par les dissensions, éclate, au grand soulagement de Paris et du rival ivoirien Félix Houphouët-Boigny. Place, dès lors, à la souveraineté en solo. Et, sans doute est-ce là le legs le plus précieux de l'ère Senghor, à l'instauration de solides fondements étatiques.
En 1976, le monopartisme de fait s'estompe au profit d'un pluralisme encadré. Trois mouvances sont autorisées à courtiser l'électorat : la famille socialiste, qui tiendra les commandes jusqu'à l'aube du troisième millénaire, les communistes et la nébuleuse libérale, qu'incarnera un opposant inventif et pugnace, "Ablaye" Wade, le futur chantre du sopi (changement).
Dans l'ombre du frêle fils de Joal, homme de lettres et homme d'Etat, président catholique d'un pays aux neuf dixièmes musulman, mûrit un géant réservé, loyal et bosseur : Abdou Diouf, tour à tour directeur de cabinet, secrétaire général de la présidence, ministre du Plan, Premier ministre puis dauphin dûment intronisé. Quand, en 1981, s'efface un Senghor désireux de couler en sa retraite normande des jours paisibles et féconds, il transmet donc le témoin au natif de Louga. En 2000, celui-ci, candidat sortant d'un PS à bout de souffle, vaincu au second tour par Me Wade, aura l'élégance de reconnaître sans mégoter sa défaite.
Le doit-il à Senghor, à Diouf, à Wade, au corps des officiers, aux élites locales, à la vigilance des peuples ? Ou à l'antidote secrété par tous ? Terre de la teranga - l'hospitalité - le Sénégal figure parmi les rares pays du continent à n'avoir pas connu le moindre coup d'Etat. Le débat politique y est vigoureux, la parole libre, la presse incisive. Mais la patrie de Cheikh Anta Diop, du sculpteur Ousmane Sow, de Youssou N'Dour et du buteur olympien Mamadou Niang a aussi sa part d'ombre, explorée méthodiquement deux années durant par les Assises nationales.
Au gré de conclaves et de colloques, la société civile a ainsi passé au crible à l'approche du cinquantenaire les maux et les "crises profondes" qui rongent le tissu politico-social. Sous la conduite de l'ancien directeur général de l'Unesco Amadou Makhtar Mbow, le comité de suivi de ce forum consacrera d'ailleurs une plate-forme au devenir des institutions avant de s'atteler à la rédaction d'une Constitution rénovée et d'une "charte des libertés", comme au toilettage des statuts de la Cour constitutionnelle ou du Conseil supérieur de la magistrature.
Caprices d'enfants gâtés ? Certes non. Car au fil des ans, le "système Wade" aura cédé à la tentation d'une dérive monarchique. Ministre des Affaires étrangères entre 2000 et 2009, cheikh Tidiane Gadio a fondé en mai dernier le Mouvement politique citoyen et diffusé un manifeste qui dénonce entre autres un "projet de dévolution dynastique du pouvoir". Allusion aux prérogatives confiées à l'ancien banquier d'affaires Karim Wade. Si son président de père ne voit, pour l'heure, "personne à [sa] hauteur pour [lui] succéder", il y a fort à parier que l'oiseau rare sera de son sang.
Résolu dans l'immédiat à briguer en 2012 un troisième mandat - il aura alors 86 ans - l'ancien étudiant en économie de l'université de Besançon, où il rencontra sa future épouse, Viviane, tolère mal la critique. Voilà peu, dans un salon d'aéroport, il a ainsi passé un mémorable savon à l'ambassadrice des Etats-Unis, coupable d'avoir invité Dakar à combattre fermement la corruption. Jamais le doute ne l'effleure. Dans un entretien accordé à RFI, "Gorgui" revendique le sans-faute : "Moi, claironne-t-il, je ne vois pas de jour où j'aurais échoué. Un échec ? Non, je ne vois pas."
Difficile, pourtant, d'escamoter le casse-tête de la Casamance. Dès son investiture, "Ablaye" avait promis de guérir en cent jours le malaise de cette province isolée, travaillée par un irrédentisme récurent. Dix ans après, des gendarmes périssent encore sous les balles des insurgés.
Certes, le tombeur de Diouf peut invoquer à bon droit son volontarisme en matière d'enseignement comme les efforts entrepris en faveur de l'agriculture ou des infrastructures routières, même si plus d'un chantier pharaonique laisse les Dakarois dubitatifs. Mais il lui reste à gagner la bataille contre la pauvreté et les détresses sociales. Pour s'en convaincre, rien de tel que de sillonner les banlieues déshéritées de la capitale ou d'écouter ces cohortes de jeunes désoeuvrés qui, au péril de leur vie, tentent de rallier l'Europe à bord de rafiots d'infortune. Même le calife général des Mourides, cette influente confrérie musulmane que Me Wade a toujours pris soin de choyer, appelle désormais à la "résistance" contre les travers du libéralisme en vigueur.
A l'évidence, le Sénégal fournit au prophète du sopi, volontiers grandiloquent, une arène trop étriquée pour son génie visionnaire. Héraut de l'idéal panafricain, Wade affiche des prétentions de médiateur universel. Enclin à tirer la couverture à soi, il prétend avoir joué un "rôle décisif" dans le retour en France de la jeune universitaire Clotilde Reiss, retenue en Iran dix mois durant. Tout comme il affirma n'être point étranger à la libération de la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt. Avec un bonheur inégal, l'ex-juriste a offert partout ses services, du Darfour soudanais à Madagascar, via la Mauritanie, la Guinée-Conakry, la Côte d'Ivoire ou le Zimbabwe. Il lui arriva même de mettre ses talents diplomatiques au service des protagonistes de l'imbroglio israélo-palestinien.
Une scène de genre résume à merveille le modus operandi de l'alerte octogénaire, aussi surnommé Ndombor - le lièvre - pour sa déroutante vivacité. Elle date elle aussi des cérémonies du Cinquantenaire. "Je déclare solennellement, proclame-t-il alors à la faveur d'une adresse à la Nation, que le Sénégal reprend à partir de ce jour, 4 avril à minuit, toutes les bases antérieurement détenues sur notre sol par la France, et entend y exercer sa souveraineté." Certes, l'orateur peut juger à bon droit "incongru" le maintien de telles enclaves, rançons selon lui d'une "indépendance inachevée". Certes, le départ des 1 200 soldats français a donné lieu à d'âpres palabres. Reste que jamais ladite souveraineté ne fut contestée. Pas plus que la propriété des terrains mis à la disposition de l'ex-puissance coloniale.
Un détachement français dans le défilé sénégalais
Mais voilà, il était trop tentant de théâtraliser ainsi cette éclatante manifestation d'autonomie... Un signe, ou plutôt deux. Si Brice Hortefeux annula in extremis le point de presse programmé ce même 4 avril, un détachement bleu-blanc-rouge a défilé dans le sillage de l'armée sénégalaise sur le... boulevard du Général-de-Gaulle. Et il est prévu que 300 officiers, sous-officiers et hommes de rang hexagonaux resteront à Dakar, désormais consacré "pôle de coopération militaire à vocation régionale".
Au rayon des symboles figure aussi cette loi, adoptée fin avril, qui assimile l'esclavage et la traite négrière à des "crimes contre l'humanité". Initiative inattaquable, quoiqu'un peu tardive. Tout comme la suggestion du sénateur Pathé Guissé, qui préconise de "criminaliser la colonisation", voire, un jour, "le néocolonialisme" et les "plans d'ajustement structurels", ces remèdes de cheval dictés par le Fonds monétaire international ou la Banque mondiale, honnis depuis des lustres dans tout l'espace subsaharien.
Lové dans les bras musculeux de son père, l'enfant du Monument de la renaissance africaine pointe vers le large un index péremptoire. Qu'il en soit remercié : tout porte à croire que le Sénégal, malgré son Guide, cherche sa voie.

Par Vincent Hugeux, Christine Holzbauer, publié le 10/07/2010 à 10:00

La vérité sur l’Affaire Sudatel selon Moubarak LÔ : Une fumée sur un voile déjà épais et aussi opaque



Monsieur LÔ,
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt votre contribution parue dans le journal Walfadrji du mercredi 7 juillet 2010, intitulée La vérité sur l’Affaire Sudatel. Je salue votre courage et votre pertinence. Le pouvoir central va certainement vous tirer des lauriers étant donné que vous volez, quelque part, à son secours en vous basant sur la rigueur intellectuelle qui sied en la matière, comme vous dites. C’est tout à votre honneur. Je ne dis pas que vous le défendez !
Cela dit, mon propos sera axé sur l’amalgame que pourrait apporter votre contribution qui, dans ma compréhension, cherche plutôt à expliquer pourquoi le Ministre de l’Economie et des Finances a raison plutôt que de dire la « vraie » vérité sur l’affaire Sudatel. L’affaire Sudatel, à notre humble avis, ne consiste plus aujourd’hui à savoir seulement si les 200 millions de dollars annoncés ont été versés conformément à l’accord dans les comptes du Trèsor Public, mais aussi et surtout de répondre à la question de savoir si la question des 20 milliards de FCFA de commissions révélée est avérée ou non et à qui profite-t-elle réellement ? A l’état actuel des choses, certainement pas au peuple sénégalais !
L’intitulé de votre contribution, que je qualifierai de bonne foi, est en effet très éloigné de son contenu. Le profane qui vous lit ou qui en entend le commentaire pourrait facilement conclure que tout ce qui se dit sur l’affaire Sudatel, notamment la fameuse question des 20 milliards de commissions, n’est donc pas vrai ! Or, dans votre texte, vous n’allez pas jusqu’à affirmer cela. Vous ne vous limitez seulement qu’à confirmer, j’allais dire plutôt qu’à prendre la défense du Ministre de l’Economie et des Finances Abdoulaye DIOP lorsqu’il affirme que Sudatel a réglé la totalité du prix de la licence … et que le Trésor Public a entièrement perçu les 200 millions de dollars… Plus loin, vous suggérez dans votre texte qu’il est donc plus que temps d’arrêter la désinformation concernant un éventuel détournement de destination des 200 millions de dollars de la Sudatel. Soit, encore que le citoyen a le droit d’exiger toute la lumière sur cette question.
Auparavant, vous dites dans votre lead que (…) Bara Tall a initié une pétition pour réclamer la vérité sur les 20 milliards de francs Cfa supposés avoir curieusement disparus lors de la transaction portant l’octroi d’une licence au groupe soudanais Sudatel.
Je n’écris pas pour défendre Bara Tall, que je ne connais que de nom, comme la majorité des Sénégalais. Je souscris et j’adhère d’ailleurs entièrement à sa démarche. J’ai plutôt envie de dire qu’en matière de communication notamment par rapport à des situations de crise comme celle-là l’analyse ou la relation des faits ne doivent souffrir d’aucune ambiguïté. En un mot, la transparence totale, au risque d’être traité de partie prix ou bien de voir la situation se retourner contre soi, lorsque la vérité éclatera !
Au regard de tout cela, j’estime qu’il y a un réel amalgame. Ce que je désignerai comme un effet d’annonce – Un titre vendeur, diraient les journalistes, une volonté manifeste de brouiller les pistes, diront d’autres -- se situe à ce niveau ; entre la comparaison de l’énoncé et du lead et le contenu du reste du texte. À notre avis, la question n’est pas de savoir si le Ministre de l’Economie et des Finances a dit vrai dans cette histoire – il a le devoir de le faire – il n’a pas intérêt à faire le contraire d’ailleurs, ni d’essayer de nous expliquer une perte de change ou non, que même nous les profanes en économie nous ne ferions pas. Vous avez si bien explicité cela d’ailleurs dans votre analyse.
Le fond du débat et du problème se situe au niveau de l’affirmation première qui parle de 20 milliards de commissions versées à des parties bien citées nommément et dont on ne nous a pas apporté jusqu’à présent un démenti catégorique avec des explications claires que la raison est en mesure d’entendre et de comprendre. On nous a annoncé le prix d’une licence négociée par une équipe, paraît-il en dehors des arcanes habituels, dont l’un est venu se glorifier des prouesses qu’ils ont effectuées, devant tous les Sénégalais, sous le « coaching éclairé du Président de la République », au cours d’un conseil des Ministres dont il ne fait pas partie.
J’estime donc que lorsqu’un problème survient entre temps, avec une accusation aussi grave, après justement l’annonce faite par Abdou Latif Coulibaly de la Gazette, nous pensons que le minimum voudrait que le même scénario soit utilisé pour expliquer les tenants et les aboutissants de « cette grave accusation », qui n’a pas été officiellement démentie jusqu’à présent. C’est là où se trouve le mérite de Bara Tall, qui, si je comprends très bien, ne demande pas si la totalité des 200 millions de dollars annoncés a été versée ou non, mais de savoir plutôt qu’en est-il des 20 milliards de F CFA de commissions dont on parle, à qui profitent-ils et pour quelle raison ? En un mot, la « VRAIE » VERITE SUR L’AFFAIRE SUDATEL qui englobe beaucoup de paramètres.
Je saluerai la pertinence de votre texte si vous aviez répondu aux questions suivantes :
• Pourquoi la licence ne nous est pas revenue au prix annoncé (vous avez brossé d’ailleurs cet aspect) ;
• Existe-t-il oui ou non une commission de 20 milliards de F CFA versée à des intermédiaires et à des officiels sénégalais lors de la transaction de cette licence ?
• Si oui, à qui profite cette commission et quelle suite sera donnée à cette affaire ?
• Sinon, pourquoi les autorités ne traduisent pas devant la justice ceux (ou celui) qui ont porté ces graves accusations ?
• Quels sont les vrais tenants et aboutissants de ce dossier ?
C’est la réponse à ces questions qui, je pense, correspondrait mieux à l’affirmation de votre titre La Vérité sur l’affaire Sudatel. Tout autre forme de commentaire qui n’apporte pas d’éléments de réponse à ce questionnement somme tout basique participerait plutôt à jeter de la fumée sur le voile déjà épais et aussi opaque de cette affaire Sudatel qui est loin encore de nous livrer la vérité. Nous sommes des Sénégalais, des sénégalais intellectuels, qui comprennent ce qui se passe ici et qui voyions ce qui se fait ailleurs dans de pareilles circonstances. Nous avons le devoir d’être du côté de la vérité pour SERVIR notre peuple et non des individus ou des clans. J’ai envie de terminer ma correspondance fraternelle – parce que j’apprécie ce que vous faites dans votre domaine et pour le pays – en vous invitant à réfléchir sur cette citation de Wangari MAATAHI, Première femme africaine Prix Nobel de la Paix , en 2004 qui disait : « Les personnes qui dirigent un pays où les populations sont, en grande partie, analphabètes et mal informées parviennent facilement à les instrumentaliser. Les chefs d’Etat africains doivent être honnêtes avec eux-mêmes et mener leur pays dans le droit chemin plutôt que d’exploiter l’ignorance de ceux qui leur sont aveuglément fidèles. »

Jean Paul Ndiaye
Dakar

jeudi 8 juillet 2010

CLASSEMENT 2010 DES 500 PLUS GROSSES FORTUNES DE FRANCE: Avec 1200 millions d’euros, Mimran se place au 36ème rang



Le très attendu classement du magazine Challenges sur les avoirs des 500 personnes ou familles les plus riches de France place Jean-Claude Mimran et sa famille à la 36ème place avec une fortune estimée à 1200 millions d’euros.

Jean-Claude Mimran est-il l’homme le plus riche au Sénégal. Difficile à dire, mais selon le classement du magazine Challenges sur les 500 plus grosses fortunes de France, il se place au 36ème rang avec une fortune de l’ordre de 1200 millions d’euros soient 787 milliards de francs Cfa. Au niveau du classement, Mimran a régressé de la 25ème à la 36ème place entre 2009 et 2010. Mais au niveau des avoirs, il a, selon toujours le classement Challenges, progressé de 20% passant de 1000 millions à 1200 millions d’euros.
Il faut dire que Mimran est très peu connu en France et très célèbre en Afrique avec le groupe du même nom qui a pignon sur rue en Afrique, et surtout au Sénégal et en Côte d'Ivoire, où la famille française et son groupe sont partout. En particulier, elle possède la Compagnie sucrière sénégalaise (Css), deuxième employeur du pays après l'Etat. Elle est également actionnaire de la Compagnie bancaire de l'Afrique occidentale (Cbao), propriétaire des Grands Moulins de Dakar, des Grands Moulins d´Abidjan et des Grands Moulins du Tchad. Le groupe Mimran appartient aux trois fils du fondateur, dont Jean-Claude qui en est également le patron. Il est également présent dans le négoce de céréales et le transport maritime en Afrique de l'Ouest.
Parmi les hommes d’affaires français ayant des activités au Sénégal et qui figurent dans ce classement, c’est Vincent Bolloré qui est en tête (11ème rang du classement) avec une fortune de 2917 millions d’euros, suivi de Jacques Merceron-Vicat (30ème rang avec 1502 millions d’euros), le propriétaire de la cimenterie Sococim.
Au niveau français, le classement des 500 plus grosses fortunes est dominé par Bernard Arnault, le patron et actionnaire de LVMH, avec 22,7 milliards d'euros de fortune professionnelle, suivi de Gérard Mulliez et sa famille, les actionnaires du groupe Auchan (ils étaient premiers en 2009) qui décrochent cette année la deuxième place avec 19 milliards. En numéro trois, avec 17 milliards, est placée Liliane Bettencourt, actionnaire de L'Oréal aujourd’hui dans la tourmente avec l’histoire de fausses déclarations dans laquelle est mouillée la femme d’Eric Worth actuel ministre du Travail et anciennement ministre du Budget français.
Il faut cependant signaler que la fortune totale des 500 plus gros patrimoines professionnels français a augmenté en un an de 25%, passant de 194 à 241 milliards d'euros. Quant au "Fmic", la Fortune minimale d'insertion au classement de Challenges, il est cette année de 53 millions d'euros, alors que l'an dernier à pareille époque le 500e du classement avait une fortune professionnelle de tout juste 40 millions.
(Avec le site www.challenges.fr)

mercredi 7 juillet 2010

LA SENELEC S’EXPLIQUE SUR LES CAUSES DES DÉLESTAGES: Des «rafales de vent» aux «contraintes techniques liées au combustible»


L’explication sur les causes des délestages notés actuellement un peu partout quitte le terrain des « rafales de vent » consécutifs à la pluie de mardi dernier pour atterrir sur des « contraintes techniques liées au combustible ». C’est ce qui ressort du dernier communiqué de la Senelec.

Mercredi dernier, les zones comme Hann-Mariste, les Sicap, Pikine, Guédiawaye, Golf, les Parcelles assainies (Unités 12 et 17), Grand-Yoff étaient dans le noir. Contacté pour avoir l’explication de ces coupures alors que la Senelec disait avoir mobilisé 21 milliards de francs Cfa pour permettre aux Sénégalais de suivre convenablement les 64 matches de la Coupe du monde de football, Mamadou Diallo, de la Direction de la communication de la société d’électricité mettait ces défaillances sur le compte des bourrasques de vents qui avait accompagné la pluie. «On a connu des pannes un peu partout à travers le pays et pas seulement à Dakar à la cause de vents forts qui ont accompagnés la pluie du mardi nuit. Par endroit même des poteaux électriques ont été arraché. Mais les équipes sont sur le terrain depuis lors pour remettre le réseau en état. Mais par endroit cela peut prendre du temps du fait de la nature des dégâts et des installations», avait expliqué Mamadou Diallo.
Mais hier, un communiqué laconique émanant de la Direction de communication de la Senelec donne une autre version sur les causes des délestages. Après un préambule sur «la demande en énergie (qui) a été correctement satisfaite durant le premier semestre avec notamment une bonne couverture des grands événements à caractère national et international», la Senelec se jette à l’eau : «Cependant, ces derniers jours, la fourniture de l’énergie connaît des perturbations en raisons de l’arrêt de la Centrale C6 de Bel Air et de la baisse de la capacité de la Centrale C4 de Cap des Biches du fait de contraintes liées au combustible ». Ce qui, à en croire la Senelec, a occasionné une rupture de «l’équilibre offre-demande (qui) s’est dégradé entraînant des délestages dans certaines localités du pays».
Cependant, force est de reconnaitre deux choses : la première, c’est qu’en une semaine, la Senelec est passée des causes naturelles (rafales de vent) à des éclaircissements techniques (combustible) alors que les Sénégalais continuent à broyer du noir. La seconde, c’est que des explications, il ressort que le problème est lié au «combustible». Ce qui permet de reposer la question des 21 milliards de francs Cfa que la Senelec dit avoir mobilisé la coupe du monde. En effet, lors de la conférence de presse, Seydina Kane, le patron de la boite, avait laissé entendre que cette somme était en majorité réservée «à la sécurisation de l’approvisionnement en combustible». Dans ce cas, il est à se demander si effectivement cette somme a été mobilisée et a majoritairement servi à «sécuriser» le combustible.
Ce qui fait revenir à la question fondamentale des options stratégique pour un secteur censé faire marcher l’économie sénégalaise. En effet, il y a manifestement un mauvais choix de politique énergétique, mais surtout un mauvais choix dans le domaine de l’approvisionnement en combustible. Car l’énorme épine qui est au pied de la Senelec est l’approvisionnement parce qu’elle est prise au collet par les fournisseurs qui exigent d’être payés au comptant alors que la Senelec revend l’électricité à crédit à ses client qui paient 90 jours après la facturation. A cela, s’ajoute le retrait de Shell du marché des hydrocarbures. Ce qui crée un gap dans la fourniture de combustible parce que ce marché se résume aujourd’hui à la Société africaine de raffinage (Sar) et à Total.
Mais l’un dans l’autre, les explications de la Senelec font ressortit le peu de respect et de considération que cette entreprise a vis-à-vis des Sénégalais en général, et de ses clients en particulier.
Par ailleurs, la Senelec ne dit pas dans son communiqué quel temps se donne-t-elle pour résoudre cette équation au regard de la période de canicule dans laquelle nous nous trouvons.
Reste à savoir aussi, combien de temps se donne la Senelec pour servir une autre explication sur les délestages.

jeudi 1 juillet 2010

GESTION DES DENIERS PUBLICS: Wade, le Ghana et le nombre de ministres


En voulant répondre à ses détracteurs qui dénoncent la pléthore de ministres, le président Wade compare le Sénégal au Ghana où il y a, selon lui, 67 ministres.

Présidant, ce mercredi au Théâtre national Daniel Sorano la cérémonie de remise du Grand prix du chef de l'Etat pour les sciences, le président Wade a voulu répondre à ses détracteurs qui raillent le nombre de ministres issus de sont dernier remaniement. Taille que les observateurs mettent en corrélation avec la rareté des ressources publics pour mieux s’insurger contre le train de vie dispendieux de l’Etat. Mais pour Wade, «le coût d'un ministre au Sénégal est vraiment dérisoire et ce n'est pas 40 millions Cfa par an. Les grosses dépenses ne sont pas là-bas, elles ne sont pas du côté des ministres, elles sont certainement ailleurs ». Poursuivant, il fait savoir qu’ «il y a des gouvernements comme celui du Ghana où il y a 67 ministres. Nous, nous sommes loin de là ». Mais, en visitant le site du gouvernement, le Ghana, ce n’est pas 67 ministres comme l’annonce Wade, mais 23 dont quatre ont la dignité de ministre d’Etat.

En s’arrêtant sur le cas du Ghana que le président décrit comme un pays comptant 67 ministres, Me Wade aurait du –même si comparaison n’est pas raison- pousser l’analogie. C’est pour faire ressortir que le Ghana peut se payer ce luxe parce que c’est un pays riche en matières premières minières. Son économie demeure cependant essentiellement basée sur l'agriculture. L'industrie y est toutefois plus développée que dans le reste du continent. Sans compter qu’il va devenir dans les années à venir un pays producteur de pétrole grâce à la découverte en 2007 de ressources pétrolières offshore non négligeables. Le Ghana, c’est aussi une population de 23 millions d’habitants qui a fait un taux de croissance de 5,6% en 2009 au moment où le Sénégal était à 1,5% sur la même période.

Pendant ce temps, le Sénégal, c’est 41 ministres dont 15 ministres d’Etat et 3 ministres délégués. Ce qui ramène inéluctablement le débat sur le train de vie de l’Etat. Il faut savoir qu’un ministre d’Etat, c’est 5 millions par mois de salaire, là où les simples ministres ont 2 millions par mois. Compte non tenu des logements de fonction, les 3 véhicules, les vols en 1ère classe.

Pour comparer avec la France, leur gouvernement compte 19 ministres dont 2 ministres d'état (Jean-Louois Borloo et Michèle Alliot-Marie) et 20 secrétaires d'état sans rang de ministres.

Et la question qui se pose, c’est de savoir si le Sénégal peut se permettre autant de dépenses à l'heure où nos étudiants attendent leurs bourses, à l'heure où il n’y a que 10 appareils de dialyse dans tous les hôpitaux du Sénégal?