mardi 25 juin 2019

Le Coran et les hommes politiques

Aliou Sall est sous les feux des projecteurs depuis bientôt un mois après que le journal Bbc ait diffusé un reportage l'accusant d'avoir pris des pots-de-vin dans le cadre d'une transaction entre Timis Corporation (société qu'il a représenté dans le processus d'attribution de blocs d'exploration pétrolière et gazière) et la société anglaise Bp.
Dès les premiers instants, il a fait face à la presse pour nier toutes les accusations et même annoncer une plainte contre le journal; avant de se raviser pour faire une réclamation auprès de l'équivalent du Cored version anglaise!!
Mais cela n'a pas freiné l'ardeur de ceux qui l'accusent d'avoir fait main basse sur les ressources pétrolières et gazières du Sénégal. En effet, le documentaire fait état de 12 milliards de dollars de royalties que Bp devrait verser à Timis sur une période de 40 ans (chiffre que d'ailleurs l'entreprise anglaise ainsi que Kosmos, l'autre protagoniste de cette affaire, le gouvernement du Sénégal, la Mauritanie ont démenti)! Ainsi, certains ont même réclamé leurs 400 mille francs CFA, la somme qu'aurait chaque sénégalais si l'argent (6000 milliards de francs CFA) supposé avoir été détourné, avait été réparti à part égale entre les 15 millions de citoyens.
Dans cette crise mal gérée par le pouvoir et ses alliés (du point de vue de la communication avec des déclarations malheureuses, inappropriées, contradictoires,...) dont le point culminant est la sortie du ministre en charge de la communication du Palais (limogé d'ailleurs) qui a pris le contre-pied de la ligne de défense de Aliou Sall consistant à nier l'effectivité d'une transaction de 250 mille dollars (146 millions de francs CFA) supposés avoir été versés dans les comptes de sa société Agritrans (dont la gerance avait été confiée à son oncle Abdoulaye Timbo, par ailleurs maire de la Ville de Pikine).
Face à polémique toujours croissante, il fait à nouveau une sortie ce lundi 24 juin 2019 pour annoncer sa démission de son poste de directeur général de la Caisse de dépôt et consignations (Cdc) de façon fort cavalière : tout de blanc vêtu, la main droite sur un exemplaire du Coran.
Seulement, le désormais démissionnaire de la Cdc est certes le dernier acteur politique à jurer sur le Coran pour prouver son innocence et/ou laver son honneur. Mais il n'est pas le seul!!

👉 2005-2006
Idrissa Seck est arrêté et mis en prison dans le cadre des " Chantiers de Thies" et d'accusation d'attentat à la sûreté de l'État. L'homme politique Amath Dansokho, au sortir d'une visite qu'il lui a rendue, fait face à la presse pour faire une révélation. Il dit en substance que le différend entre Wade et son ex "jardiner de ses rêves" était lié à de l'argent. Or, il se trouvait qu'en ce moment, les salons de discussions bruissaient d'une rumeur disant que Karim Wade, fils du président Abdoulaye Wade, aurait été arrêté avec deux mallettes remplies d'argent à Paris. Et qu'il a fallu l'intervention du président Abdou Diouf,  alors secrétaire général de la Francophonie, pour que l'affaire soit étouffée. Et Idrissa Seck, dépêché pour récupérer l'argent, l'a fait disparaître. Ce qui provoqué l'ire Wade qui a pris prétexte des chantier de Thies, pour mettre le maire de la Ville éponyme en prison.
C'est en résumé ce qu'avait écrit le journal L'Obs alors dirigé par Aliou Ndiaye. Se sentant diffamé, Karim Wade a porté plainte et réclamé 700 millions de francs CFA de dommages et intérêts. Le jour du procès, c'est avec un exemplaire du Coran qu'il s'est présenté à barre du tribunal qui va finalement condamner le journal à le payer 40 millions de dommages et intérêts!!

👉1998/1999
Le Sénégal sort d'élections législatives où le Parti démocratique sénégalais (PDS), la principale force de l'opposition au tout puissant Abdou Diouf, sort avec des remous dans l'équipe dirigeante. Me Wade et Me Ousmane Ngom, alors N°2 de ce parti, sont à couteaux tirés par presse interposée. D'accusations en accusations, Me Wade finit par lancer un défi à Me Ngom : "vendredi, retrouvons-nous à la mosquée de Mermoz pour, devant les fidèles et après la prière, jurer sur le Coran"!! Réponse de l'ex ministre de la santé de Diouf : "quelqu'un qu'on a jamais vu prier, si on le voit à la mosquée, ce serait une vraie surprise!! Wade parle en démocrate mais agit en monarque"!!

Ainsi donc, il est facile de jurer et c'est un acte morale. Mais la République est au dessus de ces supposées considérations morales. Jurer n'éteint pas la polémique ni ne blanchit qui que ce soit. C'est du ressort de la Justice d'asseoir la culpabilité ou blanchir quelqu'un.
Bachir Fofana

mardi 7 mai 2019

Le #management en quatre leçons: #Communication, #Procédures, #Hiérarchie et #Gestion_des_affaires



1°) Communication:
Un homme entre dans la douche au moment précis où sa femme en sort, lorsque la sonnerie retentit à la porte de leur maison.
La femme s'enroule dans une serviette, descend les escaliers en courant et va ouvrir la porte d'entrée.
C'est Laurent, le voisin de palier. Avant qu'elle n'ait pu dire un mot, il lui lance :
"Je te donne 500 euros immédiatement si tu laisses tomber ta serviette".
Elle réfléchit à toute vitesse et décide de laisser choir la serviette.
Il l'admire un bon moment, puis lui tend un billet de 500 euros.
Un peu étonnée, mais contente de la petite fortune qu'elle vient de se faire en un clin d'œil, elle remonte dans la salle de bain.
Son mari, encore sous la douche, lui demande :"C'était qui ?" "C'était Laurent ", réponds la femme. "Super, il t'a rendu les 500 euros qu'il me devait ?"
👉Morale n°1: Si vous travaillez en équipe, partagez rapidement les informations concernant les dossiers communs, vous éviterez ainsi bien des malentendus désagréables.

2°) Procédures 
Au volant de la 2 CV, un prêtre raccompagne une nonne au couvent.
Le prêtre ne peut s'empêcher de regarder ses superbes jambes croisées.
Il pose subitement la main droite sur la cuisse de la nonne.
Elle le regarde et lui dit :"Mon père, vous souvenez-vous du Psaume 129 ?"
Penaud, le prêtre : Psaume 129 ?"
Il rougit une fois de plus et retire sa main, balbutiant une excuse. Les voilà arrivés au couvent. La nonne descend de la voiture sans dire un mot.
Le prêtre pris de remords pour son geste déplacé se précipite sur la Bible, à la recherche du Psaume 129 : "Allez de l'avant, cherchez toujours plus haut, vous trouverez la gloire"
👉Morale n°2 : Au travail, une bonne connaissance des procédures est recommandée pour atteindre les objectifs, pour être efficace ...

3°) *Hiérarchie
Un commercial, une secrétaire et un DRH sortent du bureau à midi et marchent vers un petit restaurant lorsqu'ils trouvent, sur un banc, une vieille lampe à huile.
Ils la frottent et un génie s'en échappe.
"D'habitude, j'accorde trois souhaits, mais comme vous êtes trois, vous n'en aurez qu'un chacun", dit le génie.
La secrétaire bouscule les deux autres en gesticulant : "A moi, à moi ! Je veux être sur une plage des Bahamas, en vacances perpétuelles, sans aucun des soucis qui pourraient empêcher de profiter de la vie!!!"
Et pouf, elle disparaît.
Le commercial s'avance à son tour : "A moi, à moi ! Je veux siroter une pina Colada sur une plage de Tahiti avec la femme de mes rêves !"
Et pouf, il disparaît.
"C'est à toi" dit le génie en regardant le directeur du personnel.
"Je veux que ces deux cons soient de retour au bureau après la pause déjeuner...."
👉Morale n°3 : En règle générale, laissez toujours les chefs s'exprimer en premier...

4°) *Gestion des affaires* :
A la ferme, le cheval est malade. Le vétérinaire dit au paysan : "Je lui injecte un remède, si dans trois jours il n'est pas remis, il faudra l'abattre." Le cochon qui a tout entendu, dit au cheval: "Lève toi !"
Mais le cheval est trop fatigué. Le deuxième jour le cochon dit : "Lève toi vite !" Le cheval est toujours aussi fatigué. Le troisième jour le cochon dit : "Lève toi sinon ils vont t'abattre !" Alors dans un dernier effort, le cheval se lève.
Heureux, le paysan dit : "Faut fêter ça!! On tue le cochon !"
👉Morale n°4 : Il faut toujours s'occuper de ses affaires et surtout ... savoir la boucler !!!

Etre communicant public aujourd'hui

La communication est avant tout un fatras de métiers qui évolue à grande vitesse grâce à l'explosion des médias sociaux. Etre communicant c'est avoir une idée, féconder un concept, valoriser un message, donner une orientation à la pensée d'un homme public, mettre de la couleur et des sentiments dans le projet de com' d'un leader ou d'un manager, écrire un discours à fort impact pour une figure de l'économie, de la politique, du social, de l'humanitaire, du spectacle ou du sport, etc.
Etre communicant c'est faire en sorte que la parole se transforme en action ou en réflexion avec un impact direct et immédiat sur la cible.
Le métier de communicant public a radicalement changé. Aujourd'hui la com' est aussi importante que l'oxygène.

Le communicant n’est ni un magicien, ni un vendeur d'illusion. La communication n'est plus la dernière roue de la carrosse. Associer la com' à la fin d’un projet, c’est de l’incompétence ou une faute professionnelle qui se paie cash.
Être communicant est un dur métier, fait de rigueur et d'abnégation. Un métier dans lequel les journées commencent la nuit. Un métier dans lequel les week-ends sont réservés à la rédaction de discours. C’est un métier dans lequel, il faut avoir des connaissances artistiques, économiques, juridiques, techniques et logistiques. Un métier dont les résultats ne sont pas scientifiquement garantis et qui conserve donc une part d’incertitude, liée aux aléas de l’humain, de la technique, de l’actualité, de la météo, de la politique ou d’événements imprévisibles… C'est aussi cela le charme professionnel de ce métier.
Oui, la communication est un métier que tout le monde pense connaître, d'où la complexité de son exercice. Mais lorsqu'il s'agit de gérer une com' de crise, là apparaît l'homme d'expérience, de terrain, de réflexe et c'est à ce moment que les autres disparaissent.
Oui, la communication est une affaire d'anticipation, de prise de parole en public, d'écriture médiatique, de stratégie de communication et de plan média. De fake news aussi.

Le silence est communication

Jacques Pilhan fut conseiller en communication de François Mitterrand (homme de Gauche) et de Jacques Chirac (Homme de Droite). Une littérature abondante est produite sur ce "sorcier de l'Elysée" célèbre pour avoir d'avoir "théorisé" la stratégie de la rareté de la parole comme un moyen puissant de créer du désir auprès des citoyens. 

En effet, la rareté crée naturellement un besoin que nous cherchons à combler. Si au contraire, la parole est trop fréquente, elle se confond peu à peu avec les informations courantes traitées par les médias et donc perd de sa valeur, une chose proprement inconcevable pour un décideur public, notamment un chef d'Etat.
Ainsi, le silence est-il un des meilleurs moyens pour prendre du recul et éviter toute réaction sous le coup des émotions, éviter toute improvisation. Au XVIIIe siècle, dans l’ouvrage "L’art de se taire", l’abbé Dinouart écrit à propos du silence politique que c’est le signe "d’un homme prudent, qui se ménage, se conduit avec circonspection, qui ne s’ouvre point toujours, qui ne dit pas tout ce qu’il pense, qui n’explique pas toujours sa conduite et ses desseins ; qui sans trahir les droits de la vérité, ne répond pas toujours clairement, pour ne point se laisser découvrir".
Un pouvoir nouvellement installé, des ministres nouvellement nommés, devraie
nt demeurer au-dessus des querelles personnelles et réserver leurs paroles et actions publiques pour des annonces stratégiques. Ils devront également savoir surprendre en alternant les moments de présence forte et les moments de retrait prolongé pour toujours rester "maître des horloges", maître de sa communication.

Les hommes et les institutions

Lorsque le général Charles de Gaulle traitait l’Organisation des Nations- Unies, ONU, de ‘’machin’’, il ne s’en prenait pas à l’institution elle- même, mais plutôt aux hommes qui l’incarnaient à cette époque, à leur manière de servir, bonne ou mauvaise, qui ne convenait pas.
Lors qu'en 2008, Abdoulaye Wade demandait la suppression pure et simple l’Organisation de l’ONU pour l’agriculture et alimentation et le transfert de ses activités au Fonds international du développement agricole (FIDA), il reprochait à l'organisation onusienne dirigée alors par Jacques Diouf, d'être «gouffre financier inefficace».
Un directeur général est muté d'une agence vers un autre (à la faveur du dernier conseil des ministres du mercredi 25 avril 2019), il s'en trouve certains qui estiment que cette nomination serait dévalorisante pour cet homme politique eut égard à son parcours académique, politique, son leadership,...
Donc si aujourd'hui cette nomination soulève quelques grincements de dents, c'est peut-être lié au fait que les travailleurs de cette agence, ont un comportement qui a fini par exacerber l'opinion.
Or en analyse stratégique, il est souvent enseigner de transformer les contraintes en opportunités. Ainsi donc, pourquoi juste résoudre un problème ? Pourquoi ne pas voir les choses en grand et faire de ce problème une opportunité, une ouverture vers quelque chose d’imprévu et de nouveau ?
Dans le cadre de l'ambition des plus hautes autorités de lutter contre l'insalubrité et l'incivisme, l'agence de sécurité de proximité (Asp) pourrait jouer un rôle déterminant avec la mise en place annoncée des brigades de salubrité.
Les institutions ne valent en réalité que ce que valent les personnalités qui les incarnent ou les animent. Ainsi donc, il n'y a pas de grandes ou petites agences. Il n'y a pas de ministères "coquilles vides"!! Il y'a juste des managers qui savent tirer le meilleur de leur institution pour avoir des résultats meilleurs au mieux des objectifs de l'autorité et des attentes des sénégalais.

mercredi 1 mai 2019

Notre rapport avec le pouvoir...

👉J'étais élève (je me souviens en 1993 de la mémorable grève des travailleurs de Senelec sous la houlette de Mademba Sock qui a valu à Youssou Ndour la fameuse chanson "bou leen coupé"), ils étaient déjà syndicalistes derrière le dinosaure feu Madia Diop. 👉Suis étudiant, ils disent défendre les intérêts des travailleurs. 👉Suis dans le monde du travail (depuis bientôt 17 ans), et ils disent qu'ils défendent encore les intérêts des travailleurs. Aujourd'hui, ces mêmes responsables de centrales syndicales (Mademba Sock, Cheikh Diop, Mody Guiro, ...) vont encore se présenter devant le président de la République pour défendre les travailleurs. Eux les retraités en plus!! Et jusqu'à quand encore ? Vivement l'alternance à la tête des organisations syndicales!!!! Ce qui se passe dans le monde syndicale, se passe partout et dans toutes les organisations. ✅Mbagnick Diop Souche est à la tête du Mdes depuis sa création. Mansour Kama trône sur la Cnes depuis plus de 20 ans. Baidy Agne sur le Cnp depuis trop longtemps lui aussi. Amadou Lamine Niang, est entré à la chambre de commerce (En 1974 comme secrétaire général, puis président en 1991) pour n'en sortir que décédé en 2018. La fédération des boulanger a toujours le même président en la personne de Amadou Gaye. Abdel Kader Ndiaye est depuis fort longtemps le président du syndicat du BTP. ✅Dans le monde du sport, Diagna Ndiaye est depuis plus de 10 ans le boss du Cnoss. Augustin Senghor a trop longtemps dirigé la fédération sénégalaise de foot malgré les échecs répétés de campagne en campagne!! Dans le mouvement Navetane, Amadou Kane reste éternel président de l'Oncav alors qu'il s'approche de la retraite!! ✅Dans nos dahira, pareil. ✅Chez les associations consuméristes, ce sont les mêmes têtes à la présidence : Momar Ndao à l'Ascosen, Massokhna Kane à Sos consommateurs, ... Après, normal que les partis politiques fassent comme les autres organisations. Rarement on y a des alternances à la tête. Moustapha Niasse est le secrétaire général de l'AFP depuis sa création en 1999. Tanor Dieng plastronne au Parti socialiste depuis le "congrès sans débat" de 1996. Wade est le secrétaire général national du Pds depuis 1974. Macky Sall est président de l'Apr depuis sa création en 2008. Landing Savané est secrétaire général de Aj depuis ...heu heu. Me Elhadj Diouf au Ptp. Idrissa Seck au Rewmi depuis sa création. Et tous ceux qui ont contesté le leadership du boss de leur parti ont fait scission pour...aller reproduire la même chose. Moralité : Quand on a une conception jouissive du pouvoir, on passe difficilement le témoin. Il est aisé alors de comprendre tout le reste. Et c'est le paradoxe sénégalais : ce que l'on exige des gouvernants, on ne se l'applique jamais soi-même. Des dahiras aux Asc, en passant par les mosquées, c'est partout pareil.

mercredi 17 août 2011

GESTION DES DECHETS AU SENEGAL: SOPROSEN pour ôter l’or des ordures aux collectivités locales


Un projet de loi déposé sur la table des députés va consacrer la création d’une Société pour la propreté du Sénégal (SOPROSEN) chargée «du nettoiement et de la gestion de l’ensemble de la filière ordures sur l’étendue du territoire national». Ce, au détriment des collectivités locales et de l’Agence nationale pour la propreté du Sénégal (APROSEN).

Exit les collectivités locales dans la gestion des ordures. Place à la Société pour la propreté du Sénégal (SOPROSEN). Tel en a décidé l’Etat qui, à travers le ministère de la Culture, du genre et du Cadre de vie, a déposé un projet de loi à l’Assemblée nationale pour autoriser «la création d’une société à participation publique majoritaire dénommée la Société pour la propreté du Sénégal (SOPROSEN S.A.), régie par les dispositions de la loi N°90-07 du 26 juin 1990 relative à l’organisation, au contrôle des entreprises du secteur parapublic et au contrôle des personnes morales de droit privé bénéficiant du concours financier de la puissance publique». Une société à qui «reviendra la charge d’appliquer la politique définie par l’Etat en matière de ramassage et de traitement des ordures».

Dakar perd son statut spécial et ses 10 milliards

«Investie d’une mission de service public», la SOPROSEN est «chargée du nettoiement et de la gestion de l’ensemble de la filière ordures sur l’étendue du territoire national». Selon le projet de loi dont Enquête détient copie, la nouvelle société «assure la maîtrise d’ouvrage déléguée pour l’Etat et les collectivités locales, des opérations de nettoiement des lieux publics et de gestion des ordures ainsi que des équipements et infrastructures y afférents. A ce titre, l’Etat, et le cas échéant, les collectivités locales, met à la disposition de la société pour la propreté du Sénégal les ressources matérielles et financières requises pour l’exercice de cette mission, notamment celles issue de la taxe sur les ordures ménagères collectées à cet effet».
En effet, la SOPROSEN est chargée d’«assurer, pour le compte de l’Etat, des Collectivités locales et des personnes prives ou morales, toutes les activités de nettoiement public, de pré-collecte, de collecte, de transport, de transformation/ valorisation et de stockage des ordures solides».

Un capital détenu à 70% par l’Etat et les Collectivités locales

De «mettre en place une filière de gestion des déchets biomédicaux et des déchets d’abattoirs, aux fins de leur élimination, dans des conditions compatibles avec une saine gestion de la santé des populations et du respect de l’environnement». Mais aussi de «gérer l’ensemble des équipements et des infrastructures de gestion des ordures sur le territoire national» et de «veiller de manière permanente sur les normes et actions de salubrité publique, pour assurer un cadre de vie favorable à la santé et à l’épanouissement des populations ainsi qu’à la préservation de l’environnement».
Le projet de texte prévoit que «l’Etat et les Collectivités locales détiennent au moins 70% du capital de la société. Le reste est détenu par des personnes morales de droit public ou privé, toutes autres entreprises du secteur parapublic intéressées par la propreté, la salubrité et l’hygiène publique». Mieux, «les statuts de la société précisent les règles de l’organisation et de fonctionnement de la société pour la propreté du Sénégal. Ils sont approuvés par décret». Enfin, le document indique que «sont abrogées toutes dispositions contraires à la présente loi». Le texte vise principalement loi 96-06 du 22 mars 1996 portant Code des collectivités locales), la 96-07 du 22 mars 1996 portant transfert de compétences aux régions, aux communes et aux communautés rurales et la 2002-15 du 15 avril 2002 modifiant l’article 29 de la loi 96-07 qui donne à la région de Dakar un statut spécial permettant à l’Etat d’injecter quelque 10 milliards de francs Cfa par an.

Les raisons d’une spoliation

Ainsi, si le projet passe, ce sera une méga structure qui va chapeauter les ordures sur au niveau de toutes les collectivités locales. Et pour justifier cette spoliation en règle, l’Etat soutient dans l’exposé des motifs du projet de loi que «la gestion des ordures est devenue en enjeu majeur de la politique nationale, notamment en matière d’environnement et de santé publique ». Et que «la loi numéro 96-07 du 22 mars 1996 qui transférait cette compétence aux collectivités locales, n’a pas été du tout un modèle de réussite dans son application ». Pis, «la la situation (qui) prévalait dans ces mêmes collectivités locales aura empiré gravement». Ainsi, «la volonté manifeste du gouvernement, plusieurs fois affirmée à trouver une solution durable au problème, n’aura pas suffi». Et va même créer «trois problèmes». Premièrement, il y a «une discrimination inopportune dans les collectivités locales au seul bénéfice, de Dakar, (qui) pourrait laisser croire indûment que les autres régions seraient des laissés pour compte en matière d’environnement et de santé ». Le second problème réside dans «une prise en compte incomplète de la typologie des ordures » notamment les déchets biomédicaux et les déchets d’abattage, par exemple, qui «ne sont pas traités comme des cas spécifiques». Enfin, il y a «l’absence fort préjudiciable d’un schéma efficient de recyclage et de valorisation des déchets solides alors même que c’est là un point nodal à traiter».


Vers la disparition de l’Entente CADAK-CAR et le recyclage de l’APROSEN

L’arrivée de la Société pour la propreté du Sénégal (SOPROSEN) dans la gestion des ordures aura au moins deux conséquences dans le secteur. La première, c’est la mort de l’Entente CADAK-CAR, la structure regroupant les collectivités locales des départements de Dakar et de Rufisque. En effet, cette autorité créée sur les cendres de la Communauté urbaine de Dakar avait commencé, après plusieurs errements, à sortir la tête … hors des déchets en lançant un appel d’offres international pour la gestion des ordures dans la région de Dakar. Le dépouillement de cette procédure est même prévu, selon non sources, dans la semaine.
La seconde victime, c’est l’Agence pour la propreté du Sénégal qui, d’après nos informations, pourraient se recycler dans la SOPROSEN. En effet, si la loi passe, toutes les prérogatives et compétence de l’APROSEN passeront entre les mains de cette société privée. D’ailleurs, l’Etat avait voulu, à travers le décret 2001-329 (décret du reste jamais publié) portant réorganisation et fonctionnement de l’APROSEN, transférer la gestion des ordures à cette agence.
Par ailleurs, l’APROSEN approuve la création de la SOPROSEN. En effet, dans «une note sur le projet» de création de cette société privée, l’APROSEN, a souligné que «l’insalubrité règne en maitre autant dans les communes de la capitale que partout ailleurs au Sénégal». Selon l’APROSEN, «le coût onéreux des équipements et des infrastructures de gestion des déchets et les charges de leur fonctionnement sont hors de portée des collectivités locales prises individuellement».


KHALIFA SALL, MAIRE DE LA VILLE DE DAKAR
«C’est Dakar qui est particulièrement visée dans cette procédure»


C’est un Khalifa Sall amer et étonné de la création de la Société pour la propreté du Sénégal (SOPROSEN) qu’EnQuête a joint hier. Le Maire de la ville de Dakar n’a pas mâché ses mots face à cette initiative qui, à l’en croire, remet en cause «la pertinence du principe de la libre administration qui régit les collectivités locales». «Je pense d'ailleurs que Dakar qui est particulièrement visée dans cette procédure », dit Khalifa Sall qui poursuit : «Maintenant nous allons réagir. On va se réunir au niveau national, c'est-à-dire dans le cadre de l'Association des maires du Sénégal et de l'UAL et de l'Entente Cadak-Dakar pour apporter une réponse appropriée à ces dérives. Il faut qu'on élargisse le champ de notre réaction au niveau national parce que la loi vise toutes les collectivités locales».
«Je suis étonné. Dans tous les pays du monde, les ordures relèvent des collectivités locales qui sont responsables en la matière. Maintenant, on change la loi et on nous créé une nouvelle société dans laquelle l'Etat et les collectivités locales sont actionnaires. On nous enlève une compétence et on nous oblige à adhérer dans une société », dit M. Sall qui ajoute : «On doit donc se poser la question de la pertinence du principe de la libre administration qui régit les collectivités locales ». Pour lui, ce projet de loi est «un recul grave par rapport à la loi sur la décentralisation de 1996 ».

«Logique politique de contrôler les collectivités locales perdues en 2009»

La cause de cette «régression terrible », Khalifa Sall estime qu’elle est «peut-être motivée par le crédit de la Banque islamique de développement (BID) qui prévoit d'acheter 300 camions bennes pour le ramassage des ordures». Mais derrière ce recule, le premier magistrat de la ville de Dakar voit «aussi une grosse contradiction par rapport aux propos que le président Wade a toujours tenus. Il parle de consolider la décentralisation, mais il fait autre chose. Dans ce contexte, que vaut par exemple son idée de provincialisation ? C'est tout le décalage qui existe entre le discours du Président Wade et les faits. Il initie de nouveaux découpages administratifs pour reprendre des zones perdues sur le plan électoral, au moment où il fait l'éloge de la centralisation».
De façon général, Khalifa Sall considère ce projet de loi comme «le troisième recul qu'on inflige aux collectivités locales depuis 2009. Il faut se rappeler en effet qu'on nous a retiré presque tout dans le domaine du lotissement avec le nouveau Code de l'Urbanisme. Wade a ensuite procédé à de nouveaux découpages administratifs dans un but politique. Tous ces actes rentrent dans la même logique politique qui est de contrôler les collectivités locales perdues en 2009. C'est dangereux et inquiétant ».
Bachir FOFANA
(Article paru dans l'édition du 16 août 2011 du quotidien ENQUETE)