mercredi 25 août 2010

Wade peut, mais ne doit pas être candidat


Me Abdoulaye Wade, l’actuel président de la République du Sénégal est, juridiquement, admissible à briguer un nouveau mandat. La Constitution lui en offre la faculté. Nous ne nous contenterons pas de l’affirmer, nous le démontrerons ci-dessous. Toutefois, il n’est ni souhaitable ni décent qu’il se représente.
Ceux qui, comme son Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye, font une lecture première des textes pour, finalement, s’agacer et déclarer que, tout compte fait, le problème est essentiellement politique, pour ne pas dire politicien, ont tort, car ce n’est pas conforme à la vérité. Les professeurs de droit qui prétendent que l’affaire est purement juridique, n’ont pas raison non plus parce que, en matière de mise en œuvre de la Constitution, l’éclairage de la science politique, celui de l’histoire parfois, celui qu’apporte l’attitude des hommes, du peuple, etc., font que la solution se trouve, très souvent, en dehors du droit stricto sensu. Certains d’entre eux ont d’autant moins raison et sont d’autant moins excusables qu’ils confessent avoir participé à la rédaction du projet de Constitution. Que n’avaient-ils pas réglé, de manière limpide, cette question de candidature au lieu de laisser s’instaurer et prospérer la confusion ?
Depuis Boileau au moins, chacun sait que ’ce qui se conçoit bien, s’énonce clairement…’. La nébulosité apparente qui enveloppe la rédaction des articles 27 et 104, objets du débat, se retrouve dans plusieurs autres dispositions de la Constitution. On se souvient encore du cafouillage autour de l’article 27 : ’La durée du mandat du président de la République est de cinq ans. Le mandat est renouvelable une fois. Cette disposition ne peut être révisée que par une loi référendaire ou constitutionnelle.’ A cette occasion, tous les hommes d’Etat, les acteurs politiques comme les juristes, avaient émis sur la même longueur d’onde. Malheureusement, la faiblesse rédactionnelle du texte, surtout du second alinéa, avait ouvert une brèche à travers laquelle se sont engouffrés des esprits tordus aussi bien à la présidence de la République qu’à l’Assemblée nationale pour finir par modifier irrégulièrement la durée du mandat, prétextant que le recours au référendum ne concernait que le nombre de mandats et que donc la première phrase pouvait, allégrement, faire objet de tripatouillage.
Par la simple onction d’une élection à l’Assemblée nationale, acquise grâce au seul support d’une formation politique d’envergure, il est des individus qui s’imaginent pénétrés, voire imbus, ipso facto, de la science juridique. Résultat, ils donnent dans le juridisme et vous débitent des monstruosités inattendues. Pour parer à ce genre de situations, il aurait fallu écrire : ‘La durée du mandat du président de la République est de cinq ans. Le mandat n’est renouvelable qu’une seule fois. Le présent article ne peut être révisé que par référendum.’
L’avantage de cette présentation réside en ce que la négation ‘ne… que’ impose et renforce la limitation du nombre de mandats, ainsi que le Constituant de l’époque en avait, probablement, l’intention. Au deuxième alinéa, en disant ‘le présent article...’ on ferme la porte aux apprentis sorciers, non seulement parce que l’expression commande les deux phrases du premier alinéa, globalement donc sans séparation, mais aussi parce qu’elle impose de façon irrémédiable le recours au référendum pour toute tentative de modification de la durée comme du nombre de mandats, ainsi que les uns et les autres le souhaitaient. Aucune place n’est laissée à une quelconque modification par voie parlementaire, source de manipulation.
Ceci pour indiquer comment les professeurs de droit, membres des commissions de rédaction ont failli techniquement. A l’avenir, d’ailleurs, compte tenu de la baisse du niveau général en français (langue officielle), il ne serait pas superflu de s’entourer de l’expertise des professeurs de lettres. Au point qu’au stade où l’on se situe, je préfère la posture du professeur El Hadji Mbodj, pourtant intellectuellement hostile à la candidature de Wade, mais qui déclare que son ’… raisonnement peut certes souffrir de la preuve contraire, mais que le débat s’installe dans la sérénité afin que jaillisse la lumière, au grand profit de notre peuple’. (Populaire n°3222 du 19/08/2010 P. 5)
Noble attitude du juriste qui invite ceux qui en ont le temps et l’aptitude, à un exercice de doctrine ou plus simplement d’exégèse. A notre avis, compte tenu de l’urgence relative, c’est à travers l’exégèse (une sorte de commentaire et d’explication de texte) que nous trouverons la bonne réponse à la question de la recevabilité de l’éventuelle candidature du président Wade.
Pourtant, dans des situations de ce type, ce sont, en priorité, les travaux préparatoires, puis la jurisprudence qui auraient dû nous éclairer. Pour faire bref, les travaux préparatoires, c’est comme qui dirait le brouillon, les archives. Apparemment, bien qu’essentiels, ils n’existent pas ou alors ne paraissent pas disponibles. Si nos constitutionnalistes les détiennent, qu’ils les rendent publics. Par exemple, les échanges avec Me Wade ont-ils eu lieu verbalement ou par écrit ? A l’avenir, il conviendrait de recueillir et de conserver ces documents de travaux préparatoires.
Quant à la jurisprudence, il vaut mieux ne pas en rêver avec un Conseil constitutionnel éternellement ‘incompétent’ (cf. notre article in Walf du 30/6/09 P. 10 et Quotidien n°1940 du 1/7/09 P. 13). Aucune source n’est à espérer de ce côté-là, même pas suite à une demande d’avis. Au demeurant, il urge de dépasser la formule Conseil constitutionnel pour adopter une autre plus efficace du style Conseil des Sages dont nous pourrions tracer les contours plus tard.
Reste donc à tenter de voir ce qui se cache derrière l’article 104. Il dispose que : ’Le président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme. Toutes les autres dispositions de la présente Constitution lui sont applicables.’ Cela signifie que le mandat de sept ans acquis en l’an 2000 par le président Wade sous l’empire de l’ancienne Constitution prend fin en 2007 et que l’article 27 de l’actuelle Constitution n’interfère pas sur cette durée. Cette phrase met aussi de côté le mandat en cours du point de vue du comptage.
Du deuxième alinéa, se confirme l’information selon laquelle dans le mandat en cours, seules l’existence (comptage) et la durée (une fois de plus) ne relèvent pas de la nouvelle Constitution. Pour tout le reste (sens à donner à ‘toutes les autres dispositions’) le mandat initié en 2000 est régi par l’actuelle Constitution de 2001 : A titre d’exemple, signalons qu’après la mise en place d’une nouvelle Assemblée nationale, le président dont le mandat court, pourtant, depuis l’an 2000 ne peut plus procéder à une dissolution avant deux ans de fonctionnement (a.87) ; Qu’il le veuille ou pas, que cela l’intéresse ou pas, le président de l’an 2000 ‘… est le premier Protecteur des Arts et Lettres du Sénégal’ (a.42). Le titre V (a.58) sur l’opposition s’impose à lui, même si, dans les faits, il n’en respecte rien, etc.
En d’autres termes, c’est quand il se représentera en 2007 que le candidat, initialement, chef d’Etat se verra appliquer les dispositions relatives au nombre (deux au maximum) et à la durée (quinquennat) du mandat. Pour dire donc que Wade peut parfaitement être candidat à nouveau. Pour autant, devrait-il se représenter ? Nous répondons par la négative et ce, pour plusieurs raisons.
Il est constant que ceux de ses alliés de l’époque qui avaient soutenu Wade en l’an 2000, s’étaient entendus avec lui, sur la base de ses engagements, que ce serait pour un seul mandat. Après deux mandats successifs, la décence et la sagesse lui commandent de passer la main. Quand il a fait, irrégulièrement, modifier la première phrase de l’article 27 pour ramener le septennat, Me Wade indiquait expressément qu’il se préoccupait du training du nouveau président débutant en 2012. Il devrait, pour une fois, apprendre à respecter sa parole et donc demeurer conséquent avec lui-même. Chacun observe qu’il n’a plus les aptitudes physiques ni intellectuelles ni mentales ou autres pour faire face aux situations de plus en plus complexes du pays et que, dans les faits et dans son camp, il est otage d’un clan qui le manipule à sa guise et décide à sa place. A preuve, de plus en plus, il avoue ne pas être au courant des choses.
Sur le papier ou dans les faits, plus vieux chef d’Etat de la planète, plus vieux que le Pape, que Fidel Castro, que la reine d’Angleterre, que tout autre souverain exécutif du monde, le président Wade qui sera, en âge effectif, à l’orée de ses 90 ans en 2012, devrait faire siennes les recommandations du général De Gaulle - qui pourtant a aimé la France, passionnément, plus qu’une épouse ou une maîtresse - quand il enseigne qu’il faut savoir ‘quitter la table’, d’autant que ‘la vieillesse est un naufrage’.
Enfin, faire le forcing relèverait du narcissisme, car contrairement à ce qu’il avance, aussi bien dans sa majorité que dans l’opposition, la diaspora ou le reste du pays, nous sommes très nombreux ceux qui peuvent le remplacer et faire beaucoup mieux que lui. Le Sénégal, terre à jeune population, est un pays de gens intelligents qui se révèlent de plus en plus ingénieux et travailleurs.
Voilà pourquoi je soutiens que s’il persiste, Wade devra être battu à plate couture pour qu’il se réveille et comprenne qu’il a engagé l’élection de trop, sans oublier que personne n’est dupe dans son projet de transmettre gratuitement le pouvoir à son dauphin de fils. Evidemment, par sa faute, son avenir immédiat et celui de sa famille peuvent le préoccuper et expliquer son entêtement. Des solutions qui privilégient les intérêts du pays et sauvegardent les siens existent, qu’il suffit d’explorer entre gentlemen pour parvenir à un arrangement. C’est ou ça ou la défaite suivie de ce qui s’imposera inéluctablement.
Pour autant, nous ne devrions pas faire de fixation sur la candidature ou non du président en exercice ; sinon d’aucuns pourraient imaginer que nous craignons sa candidature. Nul n’a songé mener le débat sur sa double nationalité pour faire obstacle à sa candidature. Pourtant, il nous a fait jeter en prison sous le prétexte mesquin, fallacieux et mensonger d’absence de nationalité sénégalaise. Malgré les arguments juridiques en notre possession, l’élégance nous interdit de disserter et de brandir sa nationalité étrangère pour lui barrer la route à la candidature.
‘Exclusivement de nationalité sénégalaise’ (a.28), ce sont ceux-là qui mangent dans la main de Wade depuis l’an 2000, qui l’avaient fait introduire dans le Code électoral, puis dans la Constitution en visant personnellement Abdoulaye Wade. Autre débat avec cette notion qui dans l’avenir posera, très certainement, problème.
Jean-Paul DIAS

PAR MOUSSA TINE: Non, Me WADE ne peut pas être candidat !


Au sortir d’une réunion consacrée au pèlerinage 2012 le premier Ministre s’est prononcé sur le débat sur la possibilité pour l’actuel Président Monsieur Abdoulaye Wade de se représenter à la prochaine élection présidentielle. Interrogé moi-même sur cela, je répondais qu’il devait lire d’abord la constitution avant de réagir.
Effectivement la plupart des hommes politiques qui jusque là se sont prononcés sur la question, n’ont pas pris la peine de lire et d’analyser les dispositions sur lesquels s’appuie l’argumentaire.
Je suis bien entendu heureux que sur ce point, les extraits de la conférence de presse de Monsieur Wade du 1er avril 2010 publiés ce dimanche corroborent parfaitement mes propos.
En tous les cas, le premier ministre est revenu à la charge pour tenter de justifier à nouveau une candidature du Président de la République en 2012. Cette fois le texte est signé de « Me Souleymane Ndéné Ndiaye, membre du Comité directeur du PDS ». Je me permets, en conséquence, de rappeler la position qui est la mienne.
Effectivement, Me Abdoulaye Wade est élu Président de la République du Sénégal le 19 Mars 2000 et il prête serment et prend fonction le 1er avril de la même année. En janvier 2001 le Sénégal se dote d’une nouvelle constitution qui fixe en son article 27 la durée du mandat du président de la République à cinq ans, renouvelable une seule fois.
La thèse des partisans de la candidature du chef de l’Etat disent à peu près ceci : « puisque la limitation constitutionnelle des mandats du président de la République est intervenue bien après son élection, le premier mandat obtenu ne devrait être décompté. En effet « la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif ». On ne peut donc pas valablement appliquer une loi à des actes ou des faits juridiques qui se sont passés antérieurement au moment où elle a acquis force obligatoire ».
S’il fallait s’en limiter là, les tenants de la thèse de la possibilité de se représenter (jusque là uniquement des responsables politiques du PDS et de l’AST) aurait parfaitement raison. Toute leur argumentation reposerait sur le fait que la loi ne peut régir que l’avenir, jamais le passé.
Mais il faut leur rappeler plusieurs choses :
- D’abord, sur le plan des principes, il faut rappeler que le principe de la non rétro activité des lois connait plusieurs exceptions. En effet, le principe peut être parfois écarté par la loi ; d’ailleurs les jeunes de l’UJTL le rappelaient avec raison la première fois qu’une instance du PDS s’est prononcée sur ce débat (alors que je venais d’en parler lors d’une émission radiophonique). Ce sont généralement les dispositions transitoires qui règlementent explicitement le passage d’une loi ancienne à une loi nouvelle et déterminent concrètement les effets juridiques de la loi nouvelle. Elles définissent en particulier dans quelle mesure la loi nouvelle s’applique à des situations nées avant son entrée en vigueur
- Plus spécifiquement, dans notre cas, la constitution dans ses dispositions transitoires et notamment en son article 104 prévoit : « Le président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme. Toutes les autres dispositions de la présente Constitution lui sont applicables. »
Si le constituant de 2001 dans notre espèce entendait faire valoir le principe de la non rétroactivité nul n’aurait été besoin de mettre l’article 104. Cet article aurait été superfétatoire. Pourquoi mettre un article, de surcroit dans les dispositions transitoires pour énoncer une disposition qui est naturellement de principe ?
A la vérité cet article organise une exception au principe de la non rétroactivité des lois sauf pour ce qui concerne la durée du mandat du Président de la République. En effet s’il n’y avait pas la première phrase de l’article 104 le Président de la République aurait fini, comme il s’y était du reste engagé, son premier mandat en 2005 au lieu de 2007. En effet, l’article 104 doit être compris comme signifiant que toutes les dispositions de la constitution de 2001 rétroagissent sauf celles relatives à la durée de son premier mandat. En supposant qu’il y ait un problème d’interprétation, les juristes s’appuient, pour s’en sortir, sur des techniques d’interprétation et entre autres méthodes, procèdent à un exercice d’exégèse du texte. Il s’agit par cette technique de pénétrer le texte dans son esprit en s’employant à rechercher la volonté du législateur ; d’où l’importance des travaux préparatoires.
Or, parmi ceux qui ont écrit les dispositions de la Constitution, il ya le Pr. Demba SY de l’UCAD, qui s’est exprimé et dont le propos va en gros dans le même sens que le nôtre, ainsi que celui de M. Mahamadou Mounir SY dans le journal L’AS des Samedi 21 et Dimanche 22 Aout 2010. Des esprits malveillants pourront toujours pour des raisons strictement politiciennes et pour justifier des stratégies partisanes remettre en cause de tels propos notamment ceux du Professeur Pape Demba Sy, par ailleurs Secrétaire Général de parti politique et membre de BENNO SIGGUIL SENEGAL.
Mais qui mieux que le Président de la République qui a inspiré et initié la constitution de 2001 peut renseigner sur la volonté du constituant ? Qui mieux que lui peut donner la bonne interprétation de l’article 104 de la constitution ? Or, Monsieur WADE, lui-même interrogé lors de la fameuse conférence de presse qu’il a tenue le 1er Mars 2007, sur sa candidature pour l’élection présidentielle de 2012, a répondu sans ambages que de toute façon la constitution ne le lui permettait pas. Cette déclaration en droit, a une valeur juridique que personne ne peut contester.
Alors le débat peut continuer pour les gens qui cherchent à prouver une certaine loyauté à Monsieur Wade, lui qui se plaint souvent de ne pas être assez défendu par les responsables de son camp… Mais le fait demeure que la candidature de Wade en 2012, qui est déjà une forme d’offense aux sénégalais, est juridiquement irrecevable.

MOUSSA TINE
Président de l’Alliance Démocratique/ Pencoo

lundi 23 août 2010

RECEVABILITÉ DE SA CANDIDATURE: En 2007, Me Wade s’était auto exclu de la présidentielle de 2012

Le débat actuel sur la recevabilité de la candidature du président Wade n’a pas sa raison d’être si l’on sait que le principal intéressé s’était exclu de ces joutes le 1er mars 2OO7, lors de sa première conférence de presse après sa réélection.

Les responsables de la mouvance présidentielle à l’image du Premier ministre Me Souleymane Ndéné Ndiaye, Me Madické Niang, Mamadou Diop «Decroix », Aliou Dia et Doudou Wade qui défendent la recevabilité de la candidature de Me Abdoulaye Wade en 2012 ont tout faux. Et les constitutionnalistes comme les Pr El Hadji Mbodj, Pape Demba Sy, Babacar Guèye et Ameth Ndiaye qui soutiennent que le Pape du Sopi a « épuisé ses cartouches » ont raison dans la mesure où c’est Me Abdoulaye Wade qui s’était lui-même éliminé de élections à venir. C’était le 1er mars 2007, lors de la première conférence de presse qui suivi sa réélection au premier tour.
En effet, lors de cette rencontre avec la presse, Me Wade, entouré de nombre de ses collaborateurs qui, aujourd’hui, tentent de défendre mordicus la recevabilité de sa candidature, avait répondu à une interpellation de Christophe Champin, alors correspondant de Rfi à Dakar. Le chef de l’Etat avait évoqué l’impossibilité de se représenter en 2012. «J’ai bloqué le nombre de mandat à deux dans la constitution. Je ne peux pas me représenter parce que la Constitution me l’interdit. J’ai décidé donc que je ne me représenterais pas », avait dit Me Wade dans la salle des Banquets du de la présidence de la République qui ajoutait : «Pour mon successeur, ne me demandez pas de nom. Je ne peux pas vous donner de nom parce que je ne le connais pas. Mais le profil, c’est quelqu’un soit bon, qui travaille, intelligent, qui aime les populations, qui de bonne relations internationales. (…) Le cercle de choix s’arrête là ». Une description dans laquelle beaucoup d’observateurs voyaient le portrait-robot de son fils Karim Wade.
Me Wade avait également saisi cette question pour éliminer Idrissa Seck de ses potentiels successeurs. «En tout état de cause, avait di Wade, ce ne sera pas Idrissa Seck. C’est important, j’ai rompu avec lui définitivement. Et comme nous disons ici, au Sénégal, nous sommes des musulmans, nous nous retrouverons devant Dieu. J’ai rompu avec lui. S’il veut être président, qu’il utilise d’autres stratégies ».
L’on se rappelle également que c’est au cours de cette conférence de presse que le président Wade avait accusé ses adversaires qui contestaient sa victoire au premier tour, « font l’objet de poursuites judiciaires. Les enquêtes suspendues à cause des élections vont se poursuivre ». Pour Idrissa Seck, Me Wade avait dit qu’il avait subtilisé « 40 milliards de francs Cfa des fonds politiques logés dans un comptes trust aux États-Unis ». Wade avait même brandi le fameux « protocole de Reubeuss » dans lequel le Maire de Thiès s’engageait à rembourser l’argent.
Pour Ousmane Tanor Dieng, ces sont les licences de pêche qui Wade avait évoqué pour justifier les poursuites judiciaires à son encontre. Quant à Moustapha Niasse, Wade l’accusait d’avoir ouvert un bureau consulaire à Hong Kong pour vendre des passeports diplomatiques sénégalais. Il reprochait également au leader de l’Afp d’avoir acheté un bien de l’Etat (sa maison à Fann) à vil prix et payable en 19 mensualités. Pour Amath Dansokho, par contre, Wade lui reprochait des malversations quand il était ministre de l’Habitat et mauvaise gestion pour ce qui est de la commune de Kédougou dont il était le maire.

samedi 21 août 2010

Dix ans de gestion des affaires et de management des hommes : Wade, le pape de l’incompétence


Homme d’idées et d’initiatives pour qui «voyager, c’est gouverner», universitaire défaillant dans l’exercice juste et démocratique du pouvoir, Abdoulaye Wade apparaît aujourd’hui comme un chef d’Etat incompétent eu égard à la déception infligée aux Sénégalais dans la gestion des affaires du pays. Dix ans après son avènement, on se rend compte que l’homme élu avec espoir le 19 mars 2000 est à la fois mauvais gestionnaire et piètre manager. La décomposition du tissu industriel national, la montée en flèche de la pauvreté, la promotion d’une caste d’entrepreneurs féodaux et une nette volonté de confisquer le pouvoir au profit d’un fils encore plus incompétent, ont transformé le Sénégal en une République prédatrice au service d’une entreprise de patrimonialisation mafieuse. Dix ans après, on se rend compte que Me Wade est une véritable fiction sur qui il ne fallait pas compter.


De quoi Abdoulaye Wade n’est-il pas le nom ? De mille et une choses. Disons, de mille et une qualités : compétence, sérieux, probité, moralité, sagesse, patriotisme, justice, équité…A côté de telles vertus qui structurent l’action des (rares) véritables hommes d’Etat qui essaiment à travers le monde, le Président sénégalais fait piètre figure parce qu’il est à l’autre bout de cette échelle des valeurs, là où s’entrechoquent les antithèses négatives.
En quoi le Président Wade peut-il revendiquer de la compétence, en dehors de son domaine réservé, celui de l’agitation intellectuelle et idéologique permanente ? Son titre de gloire suprême revendiqué en dix ans de pouvoir, c’est l’érection d’autoroutes urbaines et d’autres infrastructures à Dakar, principalement. Or, avec seulement le tiers des moyens colossaux alloués à l’Anoci, la tête la plus brûlée de la haute Fonction publique nationale n’aurait pas fait moins bien que ces murs de Berlin qui ont corrompu le visage de la capitale, distendu les liens sociaux et physiques à coup de béton armé, et démultiplié la consommation de carburant de milliers de propriétaires de véhicules. La malédiction avec Wade est que même dans ce secteur stratégique des infrastructures, le favoritisme, la gabegie et la dissimulation ont brouillé un bilan qui aurait pu être défendu. Mais lorsqu’il ferme les yeux sur des détournements évidents de plusieurs milliards de francs Cfa, en comptant sur la lassitude collective, peut-on lui reconnaître un minimum de sagesse ? L’Anoci était une affaire de famille, l’absolution du divin occupant du Palais l’a «résolue» comme telle.

UN HOMME INJUSTE
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De l’équité. Face au méga scandale financier et technique dont l’Anoci de Karim Wade s’est rendu coupable, des Sénégalais bon teint ont été jetés en prison à partir d’incriminations fallacieuses, alors que les pires pratiques de responsables libéraux et affiliés sont couvertes et absoutes, du sommet de l’Etat aux collectivités locales. Normal, car le Président traîne un très inquiétant déficit de légitimité et d’autorité sur ce plan-là. Ses mensonges retentissants à propos de deux affaires emblématiques d’une gouvernance calamiteuse sifflotent encore aux oreilles des Sénégalais : les 7 milliards de francs reçus de mystérieux «amis taïwanais», et l’origine des fonds pour la réfection de l’avion présidentiel (au fait, il est où cet appareil ?). Pour ce double écart qui méritait la destitution comme la moindre des sanctions, le Premier des Sénégalais est le dernier donneur de leçons à qui ses sujets prêteraient attention.
Que sait faire le Président Wade ? Faire respecter la Justice ? Cela lui est impossible en pratique. Opposant, il était le héraut de la jeunesse, l’idole par qui s’exprimaient les déceptions et frustrations de centaines de milliers de Sénégalais, le réceptacle de violences urbaines suscitées ou spontanées. Président, il couvre de la puissance du pouvoir le feuilleton macabre de jeunes gens qui meurent comme des petits cafards dans les commissariats du pays ; il gracie une horde de meurtriers condamnés par la…Justice, ceux de l’affaire Me Sèye, ceux du banditisme perpétré contre des sièges de journaux ; il se bouche les oreilles sur l’enrichissement honteux de ses parents, proches et amis. Des débuts d’enquête contre certains de ses proches pris dans le traquenard de l’argent sale, comme dans cette affaire dévoilée par le Centif ? Cela lui est intolérable. La complicité militante de magistrats carriéristes et sans état d’âme lui sert de paratonnerre.

DELINQUANCE CONSTITUTIONNELLE
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la parole donnée. Comme son sosie de France, il nous promettait une République irréprochable, une démocratie exemplaire. Dix ans après, la Constitution de janvier 2001 est devenue un monstre au service de ses ambitions en attendant d’autres agressions décisives d’ici à la Présidentielle annoncée de 2012. La délinquance constitutionnelle est passée par là.
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la justice sociale. Comme Sarkozy avec le pouvoir d’achat des Français, il nous a fait miroiter le kilogramme de riz à 60 francs Cfa, mais le principe derrière cet engagement était plus noble : permettre à chaque Sénégalais d’accéder à un niveau de vie correct. Mais après une décennie de gouvernance, Wade s’est trouvé d’autres amis et centres d’intérêt qui l’ont éloigné du peuple. Son pouvoir vit au rythme de la privatisation des terres et des airs, sous un processus encore inachevé de patrimonialisation de l’Etat et des moyens de production. Cette option mafieuse qui met sur la touche les leviers traditionnels du contrôle d’Etat a libéré dans la nature de petits charognards sans dessein pour le pays autre que celui d’accumuler à l’infini les prébendes au-dessus des misères du plus grand nombre. Pour leur promotion, ces nouveaux caporaux d’industrie ont nécessairement procédé comme les bourgeois des anciens royaumes de France : acheter au prix fort des «charges» qui leur donnent en retour le droit de s’enrichir en toute tranquillité. Wade, Pca de l’entreprise familiale Sénégal, a créé de toutes pièces cette nomenclature irréductiblement affairiste qu’il entend pérenniser comme poste avancé de la base sociale conservatrice et réactionnaire d’un régime d’accaparement. Sa stratégie est claire : garder le pays pour les siens le temps qu’il faut. A tout prix. Quoi qu’il faille lui en coûter. A-t-il perdu la tête ? Non, cynisme, simplement. Les Drh de sa trempe, aveuglés par la puissance de leur position managériale, sont ceux qui installent les pires climats sociaux dans leur entreprise. Le Sénégal en fait l’expérience en dépit d’une stabilité qui obéit à des mécanismes plus socio-traditionnels que politiques.

LE PIRE DES ENTRAINEURS
De quoi Wade est-il capable ? Un plan Jaxaay avec ses maisons de misère malgré un budget officiel de 52 milliards de francs, un pèlerinage à la Mecque conduit en toute opacité, des inondations cauchemardesques dont il découvre l’horreur et la persistance un samedi après-midi, en hélicoptère ; de l’électricité fuyante dans un secteur où 750 milliards de francs auraient été injectés… La Suneor (ex-Sonacos) presque cédée au franc symbolique à l’un des porteurs d’eau du prince héritier, les Ics déchiquetées en quatre ans d’exercice avant d’être remises dans le circuit, la Sar affaiblie et remariée à des capitalistes arabes, les mines d’or du Sud-est du pays cadenassées dans une nébulosité absolue, Air Sénégal international cassée pour laisser place à Sénégal Airlines, le monde rural instrumenté pour un dessein inavouable à travers un syndicat d’Etat… Et pour l’histoire, une statue nord-coréenne à 15 milliards de francs pour la renaissance de l’Afrique, à la gloire du maître. Que sait faire et bien faire notre Président ?
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la cohérence. De la rationalité. Théoricien des gouvernements laminoir, des ministres kleenex, des conseillers fantoches, des Dg bas de gamme, tous corvéables à quelques exceptions, le Président sénégalais apparaît objectivement comme ce piètre entraîneur qui, à force de volonté négative, rétrograde son équipe en première division de district, soit à une dizaine d’échelons de l’élite dite Ligue 1. Sa théorie molle sur des joueurs (ministres) changeables à souhait et tout le temps est une faille essentielle dans ses capacités managériales. Un bon manager peut-il favoriser à ce point l’instabilité de son groupe de performance ?

UNE SANTE EN QUESTION
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la bonne santé. Il n’y a pas de doute : le Président a atteint le fond du trou le jour où il a lâché sur la radio La Voix de l’Amérique qu’il ne connaît pas qui est Babacar Gaye, son ci-devant Directeur de cabinet politique. Les propagandistes libéraux ont vite fait de passer à la page suivante, mais l’histoire retiendra que le président de la République du Sénégal a dit un jour ignorer le nom de son plus proche collaborateur. Un peu comme si Sarkozy disait sur France inter qu’il ne connaît pas Claude Guéant. Où que Obama ne reconnaissait plus Rahm Emanuel. Wade est-il en bonne santé ? Ses fans disent oui. Mais que n’eût-il clos le débat, à son avantage en plus, en autorisant la publication de son bulletin médical pour respecter une promesse faite, même pas au peuple sénégalais, mais à un journaliste de la chaîne de télé France 24 au cours de l’émission Le Talk de Paris ? Si le flou perdure si lourdement à ce sujet, il faut croire qu’il y a anguille sous roche. Où faut-il alors ranger ses incohérences verbales sur la Bande verte sahélienne lors d’un séjour au Tchad il y a quelques semaines ? Comment analyser son idée de faire islamiser Haïti par les mourides…? Dernière nouvelle : A Brazzaville pour les festivités du cinquantenaire de l’Indépendance du Congo, un coup de fatigue bien senti a empêché sa présence au dîner de gala des chefs d’Etat hôtes de Denis Sassou Nguesso…
De quoi Abdoulaye Wade est-il le nom ? De l’égoïsme. De son plaisir personnel, celui des siens et de ses affidés. Le plaisir trouvé ailleurs qui l’éloigne du pays une bonne partie de l’année. Pour voir ses militants. Et peut-être pour se soigner à l’abri des indiscrétions. A ses yeux, «voyager, c’est gouverner». Cet homme est une véritable fiction. En plus d’être incompétent. Qui l’eût cru ?


Par Momar DIENG - momar@lequotidien.sn

vendredi 20 août 2010

ME MADICKE NIANG, SES FILS ET LE VOL DE SON COFFRE FORT: Ça me concerne et ça m’intrigue

Dans sa livraison du vendredi 20 août 2010, Le Quotidien a relaté l’affaire concernant les enfants du Ministre d'Etat Ministre des Affaires étrangères, Me Madické Niang. Ce qui m’a beaucoup intrigué. Si j’en parle, ce n'est pas le vol en tant que tel qui m'a intrigué mais les sommes d'argent en jeu ! Je reviendrai sur l'aspect du vol plus loin.
Ce qui m’intrigue, ce sont les sommes d'argent : le journal dit que les enfants du Ministre ont pu acheter cash un véhicule 4x4 neuf, passé un (1) mois à l'hôtel Radison Blu, en compagnie de femmes, envisagé (ou ayant déjà acheté) une villa aux Almadies et acheter une boîte de nuit pour fructifier leurs biens. Une simple curiosité devrait toute personne à chercher des informations auprès des concessionnaires pour savoir combien coûte une voiture 4x4 neuve sur le marché, la nuitée au niveau de l'hôtel Radison Blu, une villa aux Almadies et une boîte de nuit à Dakar, pour évaluer à peu près le montant emporté par les rejetons du Ministre.
Un simple calcul me fait voir que ce doit être une somme faramineuse, si l'on sait qu'une voiture 4x4 neuve coûte au minimum 50 millions de francs Cfa, une nuitée au Radison environ 160 000 FCFA X 30 jours X 3 personnes = 14 400 000 FCFA, sans compter la nourriture, les sorties et les libéralités qu'ils se sont permis pour satisfaire les désirs de leurs compagnes d'un moment qui, à l’image de l’hôtel, sont des putes de luxe. Je ne saurais m'avancer sur le prix d'une villa aux Almadies ni celui d'une boîte de nuit. Mais nous sommes déjà presque à 100 000 000 FCFA pour ce que je viens de citer.

La question que je me suis posé d'abord, c'est où est-ce que le Ministre d'Etat a-t-il gagné pour ne pas dire pris autant d'argent, sachant qu'il n'est ni héritier d'une fortune, ni capitaine d'industrie encore moins un industriel ? Il y a dix ans seulement, il n'était qu'un avocat du barreau. La deuxième question est pourquoi garder une telle somme d'argent chez lui, dans un coffre fort? De quoi a-t-on peur? La légalité ou l'origine de l'argent?

Compte tenu du fait que la presse s'est fait l'écho de cette histoire rocambolesque, qui fait tout de même poser des questions aux citoyens sénégalais qui vivent dans la misère totale au moment où les hommes qui nous dirigent semblent vivre dans l'opulence, y a - t- il pas moyen pour la gendarmerie et la justice d'ouvrir une enquête pour voir de très prêt la situation ? Notamment punir d'abord les coupables du vol, situer l'origine de l'argent et au cas où elle serait frauduleuse, engager des poursuites contre le Ministre. Voilà un certain nombre de questions légitimes que je me pose, parce que la somme d'argent en jeu me semble trop suspecte. Il faudrait, à mon avis, que la presse fasse des investigations les plus profonds et traquent les délinquants à col blanc, même si l'on sait que les enquêtes risquent de ne même pas être ouverte avant d'aboutir. Mais je crois qu'il faut jouer un rôle d'avant-gardistes pour protéger les intérêts des populations.

Concernant le vol, j'allais dire le comportement des enfants Niang, je crois qu'il est symptomatique de la situation dans laquelle nos dirigeants éduquent leurs enfants. A vrai dire, un enfant qui entend son père ou sa mère raconter certaines histoires à longueur de journée (pour ne pas dire mentir), adopter un certain comportement suspect, voir certaines sommes d'argent entrer chez soi, tout en sachant que ce que gagne mon papa ne lui permettrait pas d'avoir cela, et bien un tel enfant ne peut avoir qu'un comportement déviant. Nous devons pouvoir, grâce à la presse, s'indigner jusqu'à la dernière énergie pour pousser nos dirigeants à changer de comportement.

mercredi 11 août 2010

PROJET DE DEVOLUTION MONARCHIQUE AU SÉNÉGAL: Les paroles qui confirment


PROJET DE DEVOLUTION MONARCHIQUE
Depuis quelque temps, le discours du président Wade et celui de son fils Karim sur la dévolution monarchique ont changé. Après les dénégations tous azimuts, on semble changer de tactique, en acceptant le principe et sa faisabilité, tout en tentant de donner le sentiment qu’un tel projet n’habite nullement le chef de l’Etat. Un plaidoyer plus ou moins déguisé, doublé d’une propagande qui joue sur un registre assez sibyllin se met petit à petit en place. On s’y prend pour réussir l’application d’un plan visant à divertir pour mieux faire avaler la couleuvre. Et par tous les moyens.

« Si Karim veut, je peux le laisser se présenter aux prochaines élections, car je ne vois pas, parmi les gens de l’opposition, qui peut le battre ». C’est cette phrase pleine d’équivoques et de considérations sournoises que Wade a lancée la semaine dernière devant des journalistes lors de son séjour aux Usa. C’est par ce bout de phrase laconique que le président de la République vient de parler au grand jour du sujet auquel il a toujours refusé de répondre directement. A chaque fois qu’il avait, par le passé, parlé de cette éventualité, il évoquait cela de façon allusive.
Aujourd’hui, les Wade (le président Wade et son fils) semblent se préparer à vider leur sac sur le sujet qui est depuis fort longtemps sur les lèvres des Sénégalais, au moins depuis plus de 5 ans. Le sujet était resté jusque-là presque tabou dans les coulisses du palais. On parlait plutôt de « rumeurs » dans les milieux du pouvoir. Parfois les tenants du régime semblaient agacés, dès lors que cette question était abordée. Les responsables libéraux, à la tête desquels, le chef de l’Etat lui-même se disaient « ahuris d’entendre parler de dévolution monarchique au Sénégal ». C’est en 2004, au plus fort de la lutte à mort engagée contre lui que l’ancien premier ministre, Idrissa Seck révélait aux Sénégalais le projet en cours : « le fils d’emprunt était sevré et que l’heure était à la promotion du fils biologique ».
Mais, jamais, le débat n’a été directement porté par le Président Wade et par ses proches. Encore moins par Karim Wade. Aujourd’hui, le signal est donné. Ou, comme diraient les observateurs les plus avertis, c’est le moment pour « sortir la grande artillerie verbale ». Même, Karim Wade en parle ! Qu’est-ce qui explique que le président Wade et son fils se livrent soudainement et à volonté aux questions de « confrères de l’extérieur » sur la dévolution monarchique ? L’explication se trouverait dans le fait que « Karim Wade utilise la théorie de la méritocratie républicaine de Léon Gambetta et son père Abdoulaye Wade pose les premiers actes de son plan secret pour se maintenir au pouvoir par procuration », explique Abdou Rahmane Thiam, Docteur en Science politique, professeur à l’Université de Montpellier en France.

Dernière botte secrète

Le Président Wade a enfin allumé les lampions de sa succession, avec une dose de calculs qui rappelle le jeu de dé. Bonjour la diversion ! Cette méthode bien calculée reste d’ailleurs son jeu favori. Et ce n’est pas gratuit. Une source, bien au fait du système électoral utilisé lors de l’élection présidentielle de 2007, révèle que « c’est un plan bien calculé pour endormir ses adversaires jusqu’à l’élection présidentielle afin de pouvoir rééditer le coup de 2007 ». Quel était le coup de 2007 ? Notre interlocuteur explique que « Moustapha Touré, président démissionnaire de la Cena, a bel et bien raison de dire que l’énigme de l’élection présidentielle de 2007 se trouve dans le fichier ». Pour ainsi dire que le fichier a été et reste piégé. C’est pourquoi, ajoute notre source, Wade veut endormir l’opposition jusqu’à ce que l’élection présidentielle soit organisée avec le même fichier électoral de 2007. Il préfère entendre les populations râler contre les coupures intempestives d’électricité, les inondations, la cherté de la vie et autres sources de mécontentement populaire, que d’entendre parler d’un « audit sans complaisance du fichier électoral », comme le veulent l’opposition et la communauté internationale. Car, tant que le fichier reste tel qu’il est, celui à qui profitera la technologie de fraude qui le sous-tend, gagnera les élections.

Casse-tête chinois de Wade

L’opposition radicale n’a jamais reconnu les résultats de l’élection de 2007 et a toujours crié à la fraude. Le boycott des élections législatives de juin 2007, devant le refus du gouvernement d’accepter un audit du fichier électoral, a aussi levé un coin du voile qui enveloppe encore la réélection de Me Wade au premier tour en 2007. Le mot d’ordre de boycott lancé par l’opposition a été amplement entendu. Ainsi, sur les 5 millions 2 mille 533 électeurs inscrits, seuls 1 million 738 mille 185 s’étaient rendus aux urnes. Soit un taux de participation de 34,7%. Alors qu’à titre de comparaison, le taux de participation avait été de 67,4%, lors des élections législatives de 2001. Comme pour signifier que celui qui venait d’être élu président de la république se montrait incapable de mobiliser 40% de l’électorat, pour faire élire des députés, alors que 54% des électeurs lui avaient fait confiance, trois mois auparavant ( ?).
Aujourd’hui, Wade pense ouvertement à parrainer la candidature de son fils Karim. Les résultats des deux dernières élections (législatives et locales) montrent que la tâche est presque impossible, si la famille Wade veut réussir son coup en comptant, exclusivement, de façon loyale et transparente sur les urnes et sur le suffrage des Sénégalais. La popularité du chef de l’Etat connaît une chute vertigineuse depuis au moins 2007. Sans compter qu’il est peu probable qu’il puisse convaincre les caciques de son parti à se mettre en phase avec lui dans la conduite d’un tel projet. Il aura naturellement en face Idrissa Seck pour combattre le projet, mais il est également sûr que beaucoup de caciques du parti vont se placer en embuscade pour torpiller une telle aventure. Même parti, Macky Sall jouera à rendre impossible la tâche. C’est la volonté des Sénégalais qui va s’avérer décisive si leur choix est libre. Ces derniers ont déjà donné une idée de ce qu’ils pensent de ce projet en humiliant aux élections locales de 2009 Karim Wade et ses prétentions, quand son père a tenté de le faire passer en contrebande pour occuper le fauteuil de maire de Dakar. Les dakarois avaient dit non.
C’est Abdoulaye Wade lui-même qui aujourd’hui justifie la décision des citoyens de la capitale de refuser son fils. Le chef de l’Etat dit : « Si Karim veut, je peux le laisser se présenter aux prochaines élections, car je ne vois pas, parmi les gens de l’opposition, qui peut le battre ». Il admet que son fils n’a pas la maturité et l’autonomie de jugement qui lui permettent d’envisager par lui-même une candidature pour diriger le pays, en reconnaissant qu’il lui faut son aval et son autorisation à cet effet. La candidature de Karim Wade est envisagée en fonction de l’existence ou non d’un candidat de l’opposition susceptible de lui faire mordre la poussière, mais non par rapport à sa pertinence et à sa signification politique pour le pays.
En réalité cette façon de se prononcer sur la candidature de son fils participe du bluff et de la dissimulation qui sont les moyens essentiels mis au service de la promotion d’un homme que tout disqualifie aujourd’hui pour prétendre aux charges que l’on tente de lui faire assumer dans le futur. Cette candidature ne peut prospérer que sous l’ombre du mensonge et de l’escroquerie politique. Dire qu’aucun candidat de l’opposition ne peut battre Karim Wade, alors que le maire actuel de la ville de Dakar l’a humilié en 2009, en l’empêchant de prendre possession de la commune, est le démenti cinglant apporté à un mensonge translucide fonctionnant comme moyen de propagande politique au service d’une cause qui, nous semble-il, est perdue d’avance.
«Un pays ne s’hérite pas, il se mérite», aurait dit Karim Wade, faisant fi du fait que c’est un truisme que de dire que «le pouvoir ne s’hérite pas». Car, les monarchies traditionnelles ont été réduites en cendre depuis la période coloniale. Et à l’heure où le suffrage universel détermine le mode d’élection du président de la République au Sénégal, il semble plus pertinent de substituer la notion de «conquête» à celle de « mérite », pour la bonne et simple raison que « celui qui conquiert démocratiquement le pouvoir est dépositaire d’une légitimité qui fonde la confiance sur la relation de pouvoir entre le gouvernant et le gouverné». Cette légitimité politique ne se «mérite» que par le tribunal des urnes. Il y a alors un préalable de «conquête» avant le «mérite».
En plus, l’article 4 de la Constitution du Sénégal de 2001 dispose : « Les partis politiques et coalitions de partis politiques concourent à l’expression du suffrage. Ils sont tenus de respecter la Constitution ainsi que les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie. Il leur est interdit de s’identifier à une race, à une ethnie, à un sexe, à une religion, à une secte, à une langue ou à une région. Les conditions dans lesquelles les partis politiques et les coalitions de partis politiques sont formés, exercent et cessent leurs activités, sont déterminées par la loi ». Le journaliste Abdou Latif Coulibaly n’a-t-il pas raison de dire qu’ « un pays ne s’hérite pas, ne se mérite pas, il se conquiert » ?
Si Wade veut voir son fils se présenter à la prochaine élection présidentielle, il faut qu’il s’adonne à un préalable : à défaut de lui créer un parti, ouvrir les portes du Pds à Karim avant de lui laisser la place pour la candidature à l’élection présidentielle. Car, ce sont les partis ou coalitions de partis qui encadrent les candidatures aux élections au Sénégal avec des exceptions pour les candidats indépendants que la loi électorale précise (caution, nombre de signatures…). Mais, auparavant, Wade devrait convaincre certains caciques libéraux qui risquent d’opposer leur veto à ce « plan machiavélique ». Surtout que la cartographie politique de « l’ouverture de l’ère des sagas familiales » en Afrique subsaharienne, selon l’expression d’El Hadji Hamidou Kassé (ancien Directeur général du Soleil), pose une véritable entorse aux principes de la démocratie. Ce retour aux ordres et privilèges doit-il prospérer en ce 21e siècle ? Certainement non !

Du mérite de Karim Wade ?

Est-il suffisant d’être le « fils du président » pour prétendre devenir le « successeur du président » ? Cette question a une importance capitale dans le contexte actuel où le débat sur ce qui semblerait être un projet de dévolution monarchique prend de l’ampleur au Sénégal. Ce débat ne peut être clos, comme le demandent certains acteurs du régime libéral comme le Ministre d’Etat, porte-parole du président Babacar Gaye, suite à la déclaration de Karim Wade. Il s’agit ici, du point de vue sociologique, d’un « fait social total », c’est-à-dire, une question qui interpelle, juridiquement, culturellement, socialement…, tous les Sénégalais. Ce débat a donc généré une vigilance dans l’opinion et réveillé des démons qui prennent racine depuis des moments sombres de l’histoire du Sénégal : l’ère des dynasties où la liberté n’était pas accessible à tous. L’héritage politique existe au plan scientifique, mais il n’est pas forcément biologique. L’accès à la fonction de président de la République a, pour le cas du Sénégal, une origine constitutionnelle et non biologique. Et une autre question se pose : Karim Wade a, certes, les moyens de ses ambitions, mais, a-t-il le mérite de ses ambitions ? Si l’échelle du temps et la mise en situation comptent dans l’expérience d’un homme d’Etat, Karim Wade a-t-il mis autant de temps et d’efforts nécessaires pour arriver là où il est aujourd’hui et incarner au plan discursif la « méritocratie républicaine » ? Ce n’est pas évident ! Tout compte fait, le temps reste le meilleur juge de l’histoire.

2000, le repère qui gêne Wade

Le bon sens et la sagesse recommandent de méditer sur la manière dont l’alternance est survenue au Sénégal en 2000. Le Président Abdou Diouf ayant sans doute compris que ceux (le peuple souverain) qui lui avaient confié cette chose sacrée qu’est le pouvoir, voulaient la lui retirer. Il l’a rendue. Et avec la manière ! Même si certains détracteurs du régime socialiste affirment que les collaborateurs du Président d’alors n’avaient pas le même sentiment. Diouf avait accepté sa défaite et félicité au téléphone, avant la proclamation des résultats, son concurrent d’alors, Me Abdoulaye Wade, actuel président de la République. Cette forme d’élégance et d’esprit de fair-play avait hissé l’image de la démocratie sénégalaise à un niveau élevé.
Aujourd’hui, ces acquis démocratiques sont sur le point d’être pollués par une idée de dévolution monarchique. Car, les expériences de ce genre réalisées en République Démocratique du Congo (Rdc) avec Joseph Kabila, fils de Laurent Désiré Kabila, au Togo avec Faure Eyadema fils de Gnassingbé Eyadema et récemment au Gabon avec Ali Bongo, fils d’Omar Bongo, posent la problématique de la « démocratisation des Etats-nation » issus des processus de décolonisation. Dans une démocratie, un fils de président de la République devrait avoir l’humilité de s’abstenir de toute idée de succéder directement à son père au pouvoir. Pourquoi ? Parce que la notion de « méritocratie » pourrait ne guère émaner d’une quelconque « légitimité politique » dans la mesure où c’est le bénéfice d’une naissance qui semble plus influencer les positions occupées ou projetées. Ce qui traduit un manquement au grand principe de l’impartialité de l’Etat et des règles qui gouvernent le jeu démocratique.
Wade a l’habitude de donner en exemple le cas de Georges Bush Junior des Usa. Mais, faux exemple ! Non seulement la trajectoire de Karim Wade ne correspond pas objectivement à une forme de mobilité sociale comme c’est le cas avec Bush Junior, mais, ce dernier n’a aucunement succédé directement à son père au pouvoir. Il a d’abord occupé un poste de gouverneur de Texas et a attendu deux mandats du Président Bill Clinton qui avait remplacé son père pour se présenter et gagner l’élection présidentielle américaine de 2000 contre le candidat démocrate Albert Arnold Gore, plus connu sous le nom d’Al Gore. Loin de ce qui se fait en Afrique. Et qui semble se tramer au Sénégal.

Babou Birame FAYE

mardi 3 août 2010

Les paradoxes d’un projet « Wade à Wade »





Forme et fond du projet.

Notre pays est une terre d’imagination, tout le monde y est devin et les conjectures y vont bon train, à longueur de journée, des cours familiales aux lieux professionnels où la rigueur a dû s’en accommoder, en passant par les grand-places. Par ces temps-ci, l’actualité qui sucre le thé des citoyens, ou plutôt le "sale", c’est le projet « Wade à Wade ».

L’on suspecte le président Wade et son fils Karim d’être acteurs de l’un des scénarios suivants, dont l’épilogue reste le même, mais qui, du point de vue des rôles et responsabilités de chaque acteur, laisse apparaître une différence très instructive.

1er scénario : existence d’un projet commun entre Wade et son fils. Cela laisse entendre qu’il y a une entente, précédée par des discussions où il s’est manifesté un égal intérêt, et aussi un égal engagement et une égale responsabilité des deux parties, dans la réalisation du projet. Autrement dit, les deux sont actifs à tous les niveaux de la programmation et de la réalisation dudit projet.

2ème scénario : Le président Wade fait le voeu et a la volonté de voir son fils lui succéder. Ce projet lui est propre. En tant que chef d’orchestre, il joue le rôle le plus actif, prend seul les initiatives, et fait jouer aux autres, son fils inclus, les partitions qu’il juge à leur hauteur.

3ème scénario : Le fils, Karim, s’imagine qu’il peut succéder à son père à la présidence, puis, avec l’approbation de ce dernier, tourne ses prétentions en ambitions, et s’emploie à les réaliser avec la bénédiction du Père.

Cette distinction nous permet de mieux questionner la faisabilité du projet et de nous prononcer avec précision sur ses forces et faiblesses.

Les paradoxes.

Lorsque, au niveau du premier scénario, l’on imagine une entente entre le père et le fils, elle apparaît comme une relation horizontale où le projet, il me semble, se trouverait plutôt au milieu des deux parties face à face, chacune le repoussant vers l’autre. Alors que, pour faire avancer un projet commun, il faut pousser ensemble dans le même sens. Pour parvenir à cette vision, il faut avec un minimum de scepticisme, se situer au niveau des arguments de l’une et de l’autre partie. On ne peut promouvoir avec succès un projet qui nécessite l’adhésion du plus grand nombre, que si l’on arrive à motiver les autres à une alliance, en leur donnant à voir de manière claire leur intérêt, tant individuel que collectif, à sa réussite. Or, dans le cas précis, l’une et l’autre partie se gardent de clarifier leurs intentions, encore moins de se prononcer en faveur d’une officialisation de ce projet. On entend par-ci, par-là, « mon fils est un citoyen sénégalais, il a le droit de prétendre à la magistrature suprême » ou encore « si je voulais mettre mon fils à ma place, je saurais par où passer », « le pouvoir se mérite mais ne s’hérite pas… »

Le problème, dans ce cas de figure, réside dans l’impossibilité de promouvoir le projet dans la transparence et la clarté. L’on est obligé de saper les fondements même de la discipline de leadership, en dissimulant du mieux qu’on peut sa stratégie, en développant autour de soi une culture d’hypocrisie et de déloyauté, et en reléguant au rang de tare la culture de la confiance mutuelle et la discipline du partage et de l’échange d’information. Aucune alliance n’est possible avec une telle attitude, bien au contraire, on promeut la médiocrité, on perd progressivement estime et soutien, on rencontre résistance et défiance, pour n’aboutir finalement qu’à faire l’unanimité contre soi-même. Le projet serait donc voué à un échec dans de pareilles conditions.

Considérons le second scénario : que le président ait un tel v?u et s’emploie à le réaliser, au grand bonheur de son fils. Le projet établirait entre les deux parties une relation de figure verticale en direction du bas (du père vers le fils), où seul le père aurait un rôle actif dans la conception et la mise en oeuvre.
Il en résulte alors un problème au niveau des deux parties, par rapport aux objectifs mêmes du projet, mais aussi et surtout par rapport au statut et aux devoirs du père, qui, lui, incarne une institution.
Ce scénario implique que quelqu’un de quasiment inconnu, dans une attitude de soumission craintivement passive, avec un déficit handicapant de communication, puisse, de par la seule volonté de son père au pouvoir, accéder à la magistrature suprême d’un État démocratique. La démonstration d’aucune compétence ne serait donc nécessaire à l’accession à cette honorable fonction. Elle "s’hériterait" aujourd’hui, alors qu’il avait fallu, à celui qui l’occupe en ce moment, vingt-six années de lutte âpre, dédiée à l’avènement d’une démocratie fonctionnelle et à toute épreuve, pour aboutir à son élection – expression de la volonté du peuple.
Le statut du père à la station présidentielle, et les devoirs qui s’y rattachent vis-à-vis des lois, des institutions de la République, des partis politiques et de la société civile, des aspirations et ambitions du peuple sénégalais, constituent, face à ce projet, un rempart de scrupules et de décence, pour tout homme sensé et digne.
Comment, à partir de là, motiver le plus grand nombre à adhérer à un projet où, en dehors de leur personne et de celles de leurs protégés, les autres ne mériteraient que renoncement à leur identité, au respect des leurs, à leurs ambitions, leur passé de militant, leurs valeurs, leur foi, leurs croyances, leur idéal collectif, leur liberté de choix et leur dignité ?
Deux schémas seulement pourraient conduire à un tel naufrage, ou sabordage, de la société :

1. Une identification absolue entre le leader Wade (président de la République) et la majorité des Sénégalais,
2. Une dynamisation de la corruption machiavélique.

L’identification suppose que le président s’érige, par tous ses actes et comportements, en modèle d’intégrité, de Justice, d’éthique, de générosité et d’abnégation. Je laisse le soin à chacun d’apprécier si, oui ou non, tel est le cas, mais, en tout état de cause, ce projet-ci ne serait pas un acte honorable pour un modèle dans le contexte sénégalais.

La dynamisation d’une corruption machiavélique à l’échelle nationale comme solution : je préfère croire que la sagesse de l’homme de plus 80 ans, de l’intellectuel "le plus diplômé de l’Afrique", du professeur émérite, du combattant infatigable de l’émergence de l’Afrique noire, toutes ces qualités et tant d’autres réunies, l’en préserveront. Son fils, en tant que citoyen parmi les plus favorisés de cette nation, n’a pas besoin davantage de son coup de pouce, si l’intelligence et les connaissances qu’on lui prête sont réelles. Il ne devrait pas lui en vouloir de le laisser se débrouiller seul et d’assumer avec responsabilité son destin. Ce faisant, le père se libérerait d’un stressant projet, pour se concentrer à la recherche d’une meilleure voie apte à aider au renforcement de notre chère démocratie, s’il ne veut pas clôturer sa belle carrière par un acte annihilateur.

3éme scénario : Le fils Wade s’imagine qu’il peut et doit remplacer son père…
Dans ce cas de figure de relation verticale orientée vers le haut (du fils vers le père), Karim devrait jouer le rôle principal, concevoir, mettre en oeuvre et assumer la communication de son projet. Ce serait plus rassurant pour le peuple sénégalais si tel était le cas, puisque, ce faisant, il démontrerait ses compétences politiques et son leadership. Cela ne semble pas être le cas, Karim n’est pas mieux connu des Sénégalais aujourd’hui, qu’il est super ministre d’État, qu’hier lorsqu’il assurait la présidence de l’ANOCI. Alors, le projet ne peut non plus prospérer dans ce cas de figure, vu l’absence totale d’actes essentiels à sa promotion.

En décortiquant ainsi ce projet d’actualité, je ne cherche pas à nier son existence dans l’imagination des parties évoquées, ni dans celle d’une fraction de la société, encore moins à endormir ceux qui s’emploient à s’y opposer. Je veux plutôt démontrer ce qu’il en coûte de le mettre en oeuvre et de le réussir.
En conclusion, je dirai que les Wade auraient plus à craindre d’eux-mêmes que de leurs opposants quant à l’avortement d’un projet de succession monarchiste, s’ils venaient à vouloir l’imposer aux Sénégalais.

Pour éviter que mes opinions soient mal comprises, je donne à méditer une consigne de Bill Gates, de Microsoft, à ses agents : « Consacrez votre plus grande attention à celui qui franchit votre porte avec colère, il n’en a pas après vous mais après nos produits ou services, c’est en celui-là qu’il y a le plus d’opportunités à saisir pour nous améliorer ».


Ibrahima Niang
Pdt de JOG CI/CIVIC
Cadre de l’initiative, du volontariat,
de l’imagination et du civisme.
Email : ibeniang@gmail.com

CES SEIGNEURS QUI NOUS GOUVERNENT




«La guerre de la liberté doit être faite avec colère.»
Louis Antoine de St Just devant ses juges en 1794.


Ces Seigneurs qui nous gouvernent, présentent de troublantes similitudes avec ceux du crime organisé. D’abord les rapports décomplexés qu’ils entretiennent avec l’argent facile, et les liens indissolubles qui les encordent avec les milieux politico affairistes. La présence dans les plus hautes sphères de l’État de troubles personnages, de voyous au col blanc, sévèrement épinglés dans des rapports d’audit, est tout simplement déroutante. Il se promène dans les couloirs du Palais présidentiel, des ministres et des membres de la garde rapprochée du chef de l’État qui, plusieurs fois, ont engagé leur honneur et le prestige de leurs fonctions dans des voies de faits et actes crapuleux. Ce Palais qui ressemble à un sombre nid de basses intrigues ! Quand un brusque flot de lumière est projeté sur leurs troubles affaires, ils se cabrent et sortent leurs crocs ! Ces si mal nommés «libéraux» du Sénégal sont peu accessibles à la critique et ne supportent pas la parole libre. Dès que leur vanité est touchée, ils ne pensent qu’à punir l’insolent. Quand on pointe du doigt leurs ignobles forfaits, ils jouent les vierges effarouchées, intentent un procès, et réclament 5 milliards de francs CFA, pour prétendument laver leur honneur qui n’est que fongible. Quand ces seigneurs perdent leur temps dans des procès, ce qu’ils font très rarement, c’est dans l’espoir de bénéficier du parapluie d’un Père Parrain haut placé dans l’administration judiciaire, ou de rencontrer la complaisance de magistrats, dont la conscience s’accommode de beaucoup de choses ! Ils préfèrent plutôt user d’expédients et méthodes qui n’auraient pas déplu aux Seigneurs de la Ndrangheta (1)! Demandez à Talla Sylla ou aux journaux L’As et 24H chrono comment ils s’y prennent pour museler un insolent ou un trouble-fête trop encombrants. Nous avons déjà entendu dans ce pays un ministre en fonction, inviter publiquement ses militants, à briser la plume d’un journaliste, en d’autres termes à le tuer ! Tant de cynisme et d’indécence sont peu aisés à comprendre !
Beaucoup de consciences républicaines restent profondément troublées par le cas du journaliste d’investigation Abdou Latif COULIBALY. Des interrogations légitimes ont abouti à cette constatation certaine : on veut faire payer à Latif son indépendance d’esprit et son engagement pour la restauration des valeurs démocratiques. Ces Seigneurs considèrent ces vertus comme de l'insolence ou de l’acharnement, comme ont l’habitude de le seriner les Roquets perroquets de ce régime qui croule dans le mépris public! Mais attaquer un comportement public d’un homme politique et ses actions qui règlent notre vie quotidienne, ne procède ni de la haine, ni de l’acharnement, mais plutôt du débat public et de la saine opposition démocratique. Pour eux le journaliste, tant qu’il chante les louanges de Sa Petitesse, est libre d’expression. Il peut même être gratifié d’une planque de ministre conseiller dans le gouvernement «Galeries Lafayette» du roitelet, pour ainsi reprendre l’expression d’un autre rongeur qui a lui-même fini par succomber aux succulentes carottes présidentielles !
Nous voulons dénoncer ici avec toute la force de notre révolte inextinguible, l’épouvantable déni de justice dont ce pays est malade. Nous défions les honnêtes Sénégalais de considérer objectivement cette inculpation, on ne peut plus burlesque et surréaliste, sans que leur coeur bondisse d'indignation et crie leur révolte! La manoeuvre est tellement énorme que les bras nous en tombent. Que Latif ait pu être inculpé de recel de documents administratifs, que Baïla Wane et les prédateurs de la LONASE ne soient nullement inquiétés, c'est un prodige d'impudence, un paroxysme d’iniquité ! Ah ! L’absurdité de cette inculpation !
On va jusqu'à dire que c'est lui, Latif, le scélérat qu’il faut entraîner dans le maquis des procédures judiciaires ? Parce qu’il se serait procuré illégalement de documents administratifs pour dénoncer le pillage odieux d’une société nationale par un gang de prédateurs au coeur sec ? Mais, Grand Dieu ! Dans quel pays vivons-nous ? Quand une société en est là, elle tombe inéluctablement en décomposition.
Et nous citoyens sénégalais, au nom de qui cette justice est rendue? Cette justice, cette équité, que nous avons si passionnément voulues le19 Mars 2OOO, quelle détresse à les voir ainsi sérieusement mises à mal par ceux-là mêmes qui étaient censés venir redresser les torts, venger les passes droits que nous avait faits le régime socialiste ! L’ironie n’est que trop brutale et insoutenable ! Les réponses apportées sur cette question par les partis politiques, la société civile, les ONG «droits de l’hommiste» brillent par leur timidité.
«Il y a parfois dans l’ordre social, une pénombre complaisante aux industries scélérates.» disait si justement Victor Hugo! Sinon comment expliquer l’indifférence et l’ignorance effarantes des Sénégalais du cas Abdou Latif Coulibaly ?
Ô peuple du Sénégal ! Est-il vrai que ton sort est de te résigner dans cette longanimité, ce fatalisme odieux qui te commande d’avaler toutes sortes de couleuvres, de feindre l’ignorance, devant ce complot impudent qui vise à jeter en prison un journaliste qui mène un combat pour la bonne gouvernance ? Acceptes-tu, dans la honte et la faiblesse, la monstruosité d’absoudre le voleur et de poursuivre son dénonciateur ?
Le Sénégal n’est-il pas plutôt celui de l’égoïsme forcené érigé en règle de conduite, basé sur la norme bien connue, que les plus rusés gagnent, et tant pis pour les perdants ? N’est-il pas aussi celui de la trahison éhontée de son camp politique, de l’ingratitude indécente, pourvu qu’elles payent ? Ah ! Ce Sénégal du «Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse !». Les autres vont au charbon et moi et je reste à l’ombre pour siroter ATAYA, et discutailler sur l’issue du combat de lutte des deux Balla! Nous enrageons de l’insouciance vertigineuse, de ce peuple « de singes qui croient que Dieu ne les a pas fait naître propres à tirer marrons du feu et que c’est toujours ratons comme Latif qui doivent le faire à leur place »(2) ! Est-ce ça le modèle de société que nous voulons léguer à nos enfants ? N’est-ce pas ce que Cheikh Yérim Seck, un autre journaliste, voulait dénoncer en disant que son combat «ce n’est pour les Sénégalais qu’il le mène, mais plutôt pour le SENEGAL». Nous sommes effarés par la progression subtile de cette forme d’égoïsme virulent, de lâcheté de confort qui fait que nous ne pouvons plus nous mobiliser même pour une cause citoyenne indéniable. Cette résignation collective, cette longanimité confinable à la pusillanimité, cette sorte de discrédit brutal qui frappe toute mobilisation citoyenne qui s’apparente un tantinet à une action politique, la peur du Toumouranké de nos leaders coutumiers, politiques et mêmes religieux.
Combien sont-ils à ce jour à avoir tourné casaque pour quelques carottes présidentielles plus succulentes ? C’est là où il faut chercher les fondements de la puissance et de la tyrannie du prince! C’est ce qui fait justement que ces seigneurs agissent avec une impudence, une amoralité, une injustice, une illégalité, une arrogance et une impunité rares.
Il n’y a pas un autre homme comme Abdoulaye Wade pour savoir ces faiblesses des sénégalais. Tous repères moraux sont par terre, ici au Sénégal! Dans un effroyable fracas, la Wadolâtrie et sa monoculture de l’argent facile, a entraîné dans sa perversion des valeurs démocratiques, toutes les anciennes vertus de Ngor, de Jom, de oula ak Fayda. Un nihilisme froid et désespérant se répand dans les coeurs. Aujourd’hui c’est la source perdue de cette morale qu’il faudrait bien que nous retrouvions, au prix de quelle suprême épreuve ?
On n’a pas besoin d’aimer Latif pour le défendre ! Il fait partie de ces journalistes citoyens qui ne sont pas couchés devant les dérives du Prince et qui fournissent une lecture transversale du débat public. Défendre Latif, c’est défendre la pensée libre, la presse indépendante, son pluralisme, et plus largement l’expression démocratique. La liberté et la démocratie ne se marchandent pas!
Il reste une certitude, les seuls adversaires sérieux de ces seigneurs, comme l’a reconnu leur chef Abdoulaye Wade, ce sont les journalistes ! Un scandale éventré, c’est une parcelle de la dignité du peuple rétablie. Le contrôle citoyen que font les journalistes, c’est le travail de tous ! Latif aurait pu choisir de faire son métier comme ces journalistes «Jukebox», spécialistes des apologies et dithyrambes tarifés, capables d’être consensuels jusqu’à la compromission ! Dieu sait qu’il en a le talent, et le prince ne fera que s’en applaudir ! Que deviendrait notre chère démocratie, si les journalistes, ces «uniques opposants» de notre président démiurge, venaient à renoncer à leur combat, pour rejoindre les avocats politico affairistes, les ploutocrates, les charlatans politiciens, les spéculateurs fonciers, dans la liste des gens les moins crédibles de ce pays? Toutes sortes de truands que la logique corruptive de ce régime a réussi à entasser là comme des bêtes dans une tanière, venues satisfaire leur immonde gloutonnerie en argent facile !
Ce que la multiplication des dérives totalitaires d'un pouvoir toujours plus absurde appelle de notre part, ce n'est rien d'autre que la mobilisation citoyenne partout où cela devient nécessaire. Être républicain, ce n’est pas le respect naïf et machinal de l’ordre établi par le prince et son clan ! "Résistance et obéissance, voilà les deux vertus du citoyen. Par l'obéissance il assure l'ordre; par la résistance il assure la liberté." disait Alain.
Voilà ce que nous enseignait un célèbre avocat opposant, devenu président de la République : « Quand vous êtes avec des gens qui eux-mêmes ne respectent pas la démocratie, si vous respectez la démocratie, vous devenez le dindon de la farce. J’ai toujours dit que je suis dans le gouvernement quand il est dans la légalité. Quand il sort de la légalité, je sors de la légalité». Vous l’avez deviné c’est notre Hyper président qui parlait ainsi, quand il faisait la fierté de tous les démocrates et les déshérités de ce pays. Aujourd’hui il fait la fierté de son clan et de ses nouveaux amis qui sont accourus quand il a sonné la curée en déclarant à ses suppôts : «Nos soucis d’argent sont terminés!».

(1) Dangereuse mafia d’affaires
(2) Allusion à une Fable de la Fontaine : Le singe et le chat


Malick NDOYE, malickndy@yahoo.com

AFFAIRE GLOBAL VOICE-ARTP- SONATEL: Ce que je crois


Pour commencer ce texte, je de dois d'apporter certaines clarifications. Je dois dire que loin de moi l’idée de défendre la Sonatel. Car je ne saurais accepter que cette entreprise « rapatrie » 85 milliards de francs Cfa de bénéfices vers la France alors que le Sénégal et les Sénégalais se débattent dans des difficultés.
Pour ce qui est de Global Voice, les arguments évoqués pour légitimer sa venue ont trait à la lutte contre la fraude, à l’augmentation des revenus de l’Etat, entre autres.
Sur l’arnaque sur les communications souvent évoquée, je dois dire que c’est une initiative noble qui permet, une fois maitrisée ou réduite à sa portion la plus congrue, permet à l’Etat, aux opérateurs d’engranger des ressources supplémentaires. Mais pour le faire, avait-on besoin de prendre Global Voice si on sait que l’Artp peut, selon le Code des télécommunications, effectuer toutes les vérifications possibles et aux frais de l’opérateur. En effet, le régulateur pouvait, tous les mois, choisir un cabinet international pour s’assurer que les minutes de communication déclarées sont effectivement celles légalement entrée au Sénégal. D’où la question de savoir si on avait besoin d’ «enrichir » Global Voice de 2,4 milliards de francs Cfa par mois au regard de la clé de répartition du contrat le liant à l’Artp ; dont le Directeur général, Ndongo Diaw, a fait cas la semaine dernière.
Aussi vrai que «ce nouveau seuil n’est aucunement une nouvelle taxe », il reste que les tarifs de communications vont inexorablement augmenter. Même si dans l’argumentaire de l’Artp, on soutient le contraire. Cette augmentation des tarifs sera induite, du seul fait que les carriers ou transporteurs à qui on veut soutirer quelques sous pour assurer « une redistribution équitable des revenus … des télécommunications », vont continuer à vouloir maintenir leurs marges. Et dans ce cas, c’est le consommateur établi à l’International qui va trinquer soit en déboursant plus pour communiquer, soit en payant le même prix, mais avec un temps de communication plus court. Du coup, il sera obligé de payer plus que d’habitude pour joindre le Sénégal.
C’est le cas actuellement de la Redevance d’utilisation des télécommunications (Rutel) instituée par la loi 2008-46 du 3 septembre 2008 et appliquée depuis le 1er février 2009 au Sénégal. C’est une taxe de 2% qui s’applique sur le montant hors taxes des factures de tous les utilisateurs de services de télécommunications. La Rutel, qui a permis à l’Etat d’encaisser plus de 12 milliards de francs Cfa par an, est directement supporter par les usagers parce que les opérateurs (Orange, Tigo et Expresso) n’ont pas augmenter les tarifs de communications, mais ils ont diminué le temps de communication.
Pour ce qui est du «respect des procédures du Code des Marchés publics », il convient de faire remarquer qu’une telle affirmation n’est pas valable pour le choix des «services de l’opérateur international Global Voice Group comme partenaire technique pour la mise en œuvre du système » de contrôle des appels internationaux entrant au Sénégal. En effet, il convient de rappeler que personne n’a entendu parler d’un quelconque appel d’offres international pour le choix de Global Voice. A cela s’ajoute le fait que c’est une délégation de services publics régie par l’article 80 du décret 2007-545 portant Code des marchés qui impose un appels d’offres international.
Reste alors une procédure faite par entente directe ou gré à gré. Procédure qui est également bien encadrée dans ledit Code cité plus haut en ses articles 75 et 76. Le Code dit d’abord que «le marché par entente directe ne peut être passé qu’avec des entrepreneurs, fournisseurs ou prestataires de services qui acceptent de se soumettre à un contrôle spécifique des prix de revient durant l’exécution des prestations » (second alinéa de l’article 75). Et pour ce qui est des conditions dans lesquelles un marché de gré à gré est accepté, il faut, après avis de la Direction centrale des marchés publics (Dcmp), que le marché soit «considérés comme secrets ou dont l'exécution doit s'accompagner de mesures particulières de sécurité lorsque la protection de l'intérêt supérieur de l'Etat l'exige ». Ce qui n’est pas le cas sur le contrat de Global Voice. Le second critère pour procéder à un marché par entente directe nécessite « la détention d’un droit d’exclusivité, (qui) ne peuvent être satisfaits que par un cocontractant déterminé ». Or, tout le monde sait que Global Voice n’est pas le seul à faire dans le contrôle des appels dans le monde. Et la dernière exigence pour passer ce type de marché, c’est dans le cas d’un marché complémentaire et quand « le premier marché (est) exécuté par le même titulaire ». Ce qui revient à se demander sur quelles bases Global Voice a été choisie.
Enfin pour finir avec ce texte, il faut souligner que si «le système n’offre aucune possibilité ni d’écoute des communications téléphoniques, ni de lecture des SMS », il reste que les éléments importants d’une communication sont mise à nue. En effet, avec Global Voice, l’Artp (et naturellement l’Etat) a aujourd’hui la possibilité de savoir qui vous a appelé, d’où vient l’appel, quel est le numéro, combien de minutes ont duré la communication ? Avec toutes ces données, que reste-t-il d’une communication téléphonique ?